Anguille sous roche
Dans la littérature populaire policière française, les femmes, fut un temps, étaient rares.
Il est d'ailleurs difficile de trouver trace d'une femme dans cette paralittérature jusque dans les années 1960.
On pourra bien sûr citer Juliette Lermina-Flandre, la fille du grand Jules Lermina, mais sa production dans le genre policier se révèle au final très léger (2 fascicules, je crois).
On ajoutera Myriam Dou-Desportes, mais là encore, sa participation au genre se réduit à sa portion congrue (un seul roman), ou encore Juliette Pary, elle aussi, ne semble avoir écrit qu'un seul roman policier.
Bref, l'une des premières femmes françaises s'étant réellement consacrée au genre policier (si vous en connaissez d'autres plus anciennes, n'hésitez pas à le dire) est Geneviève Manceron (1906-1994) qui, pour les éditions Ditis a écrit entre 1956 et 1959, une série de 5 romans policiers contenant tous, dans leur titre, le nom d'un animal ou d'un insecte (« La biche », « Pauvres petites crevettes », « La puce à l'oreille », « Les brebis tondues » et « Anguille sous roche »).
En parallèle, sous le pseudonyme de Bruno Bax, elle écrira 18 romans d'espionnage ayant Hervé de Hersault dit H pour héros.
« Anguille sous roche » est donc un roman publié chez Ditis en 1958.
Anguille sous roche :
Marion et Roger Resnel, un jeune couple amoureux, débarquent à Coudray où Roger a fait construire son usine. Sur place, Marion fait la connaissance du couple Taverniez, dont la femme, Kay, est une belle Anglaise.
Les deux couples ne cessent de passer les soirées ensemble, au grand dam de Marion.
Un jour, elle surprend son mari en conversation téléphonique laissant supputer qu'il a une liaison.
Un soir d'orage, alors que Roger rentre la main blessée et prétend devoir repartir à l'Usine pour régler des problèmes, Marion, inquiète et jalouse, décide de se rendre dans une cabane dans les bois sur la propriété nouvellement achetée par son mari où logerait la belle et convoitée Ginette Lafaye.
Sur place, elle découvre le corps sans vie de la jeune femme...
Marion Resnel est persuadée que son mari la trompe. Depuis qu'ils sont arrivés à Coudray où son mari a fait construire son usine, celui-ci a changé. De plus, elle a surpris une conversation téléphonie entre son mari et une femme qui ne laisse aucun doute sur le fait qu'il a une liaison. Mais avec qui ? Kay, l'épouse anglaise de Taverniez, avec qui le couple ne cesse de passer des soirées ? La sulfureuse Ginette, une rousse incendiaire pour qui tous les hommes du pays se battent et qui loge dans une cabane sur la propriété que Roger vient d'acheter ? La magnifique Rosa, la secrétaire de Roger ?
Un soir d'orage alors que son mari rentre, blessé à la main, à la maison avant de repartir en prétextant qu'il doit se rendre à l'usine, Marion décide d'en avoir le cœur net et se rend à la cabane où elle découvre... le corps sans vie de Ginette.
Dans tous les romans policiers de Geneviève Manceron, il est question de femmes. Héroïne, protagoniste secondaire, souvent les deux, la femme est à l'honneur de ses romans.
C'est une nouvelle fois le cas ici puisque les femmes ont une place prédominante entre Marion, personnage central, Kay, personnage secondaire, mais important, Ginette, la victime, Rosa, la secrétaire et même la bonne, Anna, dont la présence est omniprésente.
Si l'intrigue tourne autour d'un meurtre, au final, ce roman se rapproche plus du genre sentimental que policier. Effectivement, la jalousie et la tromperie sont au cœur du roman et les femmes sont toutes belles et des " amantes " potentielles. L'enquête, quant à elle, au lieu d'être d'abord policière pour trouver l'identité de l'assassin, est avant tout sentimentale, car il s'agit, pour Marion, de découvrir l'identité de la maîtresse de son mari.
Heureusement, la plume de Geneviève Manceron permet tout de même à un lecteur tel que moi de poursuivre sa lecture jusqu'au bout, aidé en cela par la courte taille du roman, mais le sentiment final ne peut être qu'une légère déception.
Déception, car le roman n'est pas très ancré dans le genre policier.
Légère, car, de la part de l'auteur, on s'y attendait un peu.
Au final, un roman pas déplaisant à lire, mais sans plus, malgré le fait que l'intrigue est plus sentimentale que policière...