Un cadavre encombrant
Michèle Nicolaï, de son vrai nom Sandrine Bluette Brazier (1905-1950) est une femme de lettres et journaliste née en Suisse.
En tant que journaliste, elle collabora avec des magazines de coquins.
En tant qu'auteur, elle écrivit principalement des récits sentimentaux et un roman érotique.
Mais, à partir de 1939, elle s'essaya quelques fois au récit policier.
C'est à travers ce dernier prisme que j'ai découvert l'auteur, sa plume, et ses pseudonymes (Michèle Nicolaï, Nicole Moran et Jean-Marie Laroche).
Le titre du jour, « Un cadavre encombrant » est signé Jean-Marie Laroche et est paru sous la forme d'un fascicule de 16 pages, double colonne, en 1939 dans la collection « Police Roman » des éditions Offenstadt.
UN CADAVRE ENCOMBRANT
Jacques Renier, chauffeur de taxi, voit sa vie basculer lorsqu'il découvre un passager assassiné dans sa voiture. Paniqué, il prend la fuite, entraînant avec lui le corps dans le but de s'en débarrasser.
Mais ce mauvais réflexe va pousser Jacques à s’enfoncer dans une spirale de mensonges et d’illusions qui le conduira au bord du précipice...
Jacques Renier est un fils de bonne famille qui s'est vu couper les vivres par son riche oncle. Obligé de subvenir à ses besoins, il est devenu chauffeur de taxi. Un soir, alors qu'il vient de charger un client à la gare, dans les embouteillages, il entend deux détonations. Plus tard, il se rend compte que son client est mort à l'arrière de son taxi. Paniqué, ayant peur d'être suspecté, il décide de se débarrasser du corps, pensant que personne ne cherchera après lui avant longtemps. Mais, dans les vêtements, il découvre que celui-ci a fait réserver une chambre dans un hôtel chic. Alors, il décide de prendre sa place le temps d'une nuit afin que personne ne s'inquiète de la disparition de son client...
Voilà un petit récit policier (9 000 mots) qui part d'un postulat de base fort intéressant. Un chauffeur de taxi charge un client, dans les embouteillages, des détonations qu'il prend pour les pétarades d'un moteur, plus loin, quand il s'adresse à son client, pas de réponse. Dans son rétro, il ne voit personne. Il s'arrête, descend, ouvre la portière arrière et découvre son client, mort, une balle dans la tête. Un agent s'approche. Paniqué, il remonte dans son véhicule et démarre. Que faire ? Aller au commissariat ? Alors qu'il s'est déjà passé du temps, qu'il a fui un agent ? s'est risqué d'être suspecté. Le client débarque de Saïgon, personne ne l'a vu le charger... et s'il se débarrassait du corps... le temps qu'on s'inquiète de sa disparition, il ne serait plus inquiété. Sauf, qu'une fois jeté dans l'eau, il découvre, dans les vêtements du mort, une réservation pour une chambre d'hôtel dans un palace. S'il ne vient pas, le personnel va se poser des questions... il décide alors de prendre sa place, correspondant peu ou prou à la description du client, afin de passer la nuit dans l'hôtel et de prétexter, ensuite, un départ...
L'auteur nous plonge totalement dans la Loi de Murphy, chère à nombre de séries et de films, celle qui veut que le héros, quand il fait un choix pour arranger une situation périlleuse, ne fait que s'enfoncer encore plus profondément dans les ennuis.
Et c'est ce qu'il arrive à Jacques Renier puisqu'à partir d'un mauvais choix, celui de fuir devant l'agent de police, tous les autres à venir vont le plonger encore plus dans les problèmes.
Malheureusement, le format forçant à la concision, difficile de développer parfaitement ce parti pris et il faut bien à l'auteur verser dans la facilité afin que les choses se résolvent dans le temps imparti.
Après, donc, une première partie fort intéressante, on assiste alors à une seconde qui verse dans la facilité afin de permettre au héros de retrouver l'assassin et de parvenir à s'innocenter.
Malgré cela, il faut bien avouer que le récit est agréable à lire et que l'auteur ne trempe pas trop sa plume dans l'eau de rose, défaut qu'elle a tendance à avoir sous la plume de Michèle Nicolaï, mais moins sous celle de Jean-Marie Laroche.
Au final, un petit récit policier qui part sur des bases prometteuses mais qui, du fait de sa concision, ne tient malheureusement pas toutes ses promesses.