Les sœurs tragiques
Dans le monde du fascicule policier français, il y a quelques collections que j'affectionne tout particulièrement.
Parmi celles-ci, « Le Roman Policier » à partir de 1916, publiées par les éditions Ferenczi... sa grande sœur, au début des années 1930, « Police et mystère » et... « La collection Rouge » des éditions Janicot à partir de 1943.
C'est dans cette dernière collection que l'on peut découvrir le titre du jour : « Les sœurs tragiques » signé Léon Groc.
C'est le 51e titre de la collection, un fascicule de 32 pages contenant un récit de presque 14 000 mots, publié en 1944.
L'illustration de couverture est signée L. Levoir.
Léon Groc (1882 - 1956) est un journaliste, grand reporter, et écrivain français dont la production fit les beaux jours de la littérature populaire à travers des récits fantastiques, d'aventures et policiers et des récits patriotiques.
À noter que Léon Groc, en plus de ses romans, est l'auteur d'une mini série fasciculaire policière de 8 titres de 24 pages : « Stan Kipper, le Roi des Détectives ».
L'auteur avait donc dépassé la soixantaine au moment de la publication de ce récit.
LES SŒURS TRAGIQUES
Lorsque son fiancé, André Roche, ne donne plus de nouvelles alors qu'il effectue une mission en tant qu'ingénieur à Bordeaux, Claudine Grandelle s'inquiète et, accompagnée par sa mère, se rend sur place pour en savoir plus.
Là-bas, elle apprend que son amoureux s'est enfui avec la jeune sœur de sa logeuse et la paie des ouvriers de l'usine.
Refusant de croire à ces accusations, Claudine décide de mener son enquête.
Elle sera aidée en cela par Prosper Furet, un ami de son père, qu'elle a rencontré par hasard. Celui-ci, commissaire de police à la retraite, va se prendre au jeu et tout faire pour redonner le sourire à sa « cliente »...
André, un jeune ingénieur quitte Paris et sa fiancée Claudine pour aller faire une mission à Bordeaux. Il est logé sur place chez les Touraine, l'aînée, vieille et dévouée à des œuvres pour les orphelins et la cadette, plus jeune, plus jolie...
Les quinze premiers jours, André envoie des lettres quotidiennement. Mais, quand plus aucun courrier n'arrive pendant la quinzaine suivante, Claudine s'inquiète et décide de se rendre à Talence (le village près de Bordeaux où réside son fiancé), accompagnée par sa mère, afin d'obtenir des nouvelles.
Mais chez les sœurs Touraine, elle apprend de la part de l'aîné qu'André s'est enfui avec sa sœur et qu'il est soupçonné d'avoir volé la paie des ouvriers de l'usine.
Claudine, ne croyant pas à ces accusations, décide de mener son enquête.
À Bordeaux, elle rencontre un vieil ami de son père, un ancien policier à la retraite, auquel elle raconte ses malheurs. Dès lors, le retraité va reprendre du service pour trouver des réponses en espérant redonner le sourire à la jeune femme...
On ne présente plus Léon Groc... si ?
Bon, il faut savoir que l'auteur a de l'expérience, autant dans l'écriture de romans (policier, science-fiction, aventures...) qu'en matière de fascicules...
On retrouve donc toute la maîtrise de la plume de l'auteur et ce d'autant plus qu'il se situe, là, vers la fin de sa carrière (à plus de 60 ans).
On notera qu'il profite au maximum de la latitude du format fasciculaire de 32 pages en étendant son texte jusqu'à quasiment 14000 mots là où d'autres titres de la même collection proposent des récits de moins de 10 000 mots.
On sent dès les premières phrases que l'auteur a du métier et qu'il maîtrise à la fois le genre et le format.
En effet, le récit (pour un récit fasciculaire) est rapidement prenant et demeure intéressant jusqu'au bout même si le lecteur averti, habitué aux récits policiers, aura deviné avant le policier une partie de la vérité.
Je reproche parfois aux auteurs de récits fasciculaires, de ne pas nous proposer de personnage fort, de héros omniprésent auquel s'attacher.
C'est pourtant le cas ici puisque l'on suit d'abord les mésaventures de Claudine et de sa mère puis ensuite, en alternance, les agissements de Claudine et ceux de Furet.
On constate alors qu'aucun des deux personnages ne se détache réellement et que les deux auront de l'importance dans la résolution de l'affaire.
Pour autant, cela ne nuit pas au plaisir de lecture, contrairement aux cas que je dénonce parfois.
Au final, un petit récit policier fort agréable mené avec talent et professionnalisme par un auteur arrivé à maturité.