Écrire
L'envie m'est venue de vous parler un peu de l'écriture. Écrire, tout le monde le fait. Dans la vie de tous les jours, j'écris, vous écrivez, ils écrivent. Des lettres, des listes de courses, des notes, des sms, bref, l'écriture nous est commune à tous et toutes. Mais nous n'avons pas le même rapport avec celle-ci.
Pour certains, écrire est une corvée dont ils se passent bien volontiers. Pour d'autres, l'écriture est un fardeau dont ils aimeraient se passer parfois.
Écrire, d'accord, mais pourquoi ? Pour qui ? Pour moi, l'écriture est une maléfique bénédiction qui m'est tombée dessus au service militaire. Oui, je sais, d'autres y apprennent à boire, à tirer, moi j'ai appris à écrire. Apprendre n'est pas le terme exact, je savais déjà écrire avant le service militaire, ne me prenez pas non plus pour un neuneu, s'il vous plaît. J'ai fait des études correctes même si mon orthographe peut parfois vous permettre d'en douter. Cependant, j'ai autant de mal à répondre aux règles de l'orthographe que j'en avais à répondre à celles de l'armée.
Donc, c'est au service militaire que je me suis rendu compte que l'écriture m'apportait beaucoup et me coûtait énormément. J'avais, bien sûr, écrit quelques nouvelles insipides pour répondre aux exigences de mon professeur de français au collège, mais jusque là, rien ne m'attirait dans l'écriture, surtout pas au point de la pratiquer sans que personne ne m'y oblige. J'avais toujours détesté écrire des lettres ou de quelconques courriers.
Mais qu'a-t-il bien pu se passer durant mon service militaire pour que ce maléfice s'empare de moi ? Bah, je m'emmerdais tout simplement. J'attendais à longueur de journées assis derrière un bureau que des alarmes sonnent pour aller réparer les appareils de transmission, mais elles ne sonnaient quasiment jamais. Donc, j'étais seul, en sous-sol, derrière un bureau, sans télévision, sans radio, il ne me restait plus qu'à lire. Du Stephen King tout particulièrement ce qui n'est pas fait pour redonner le moral à un claustrophobe lorsqu'il passe ses journées enfermé sous terre. Quand j'en ai eu marre de lire, la sensation d'enfermement étant trop présente, je me suis raccroché à l'idée d'exprimer cette sensation étouffante en l'écrivant. Stephen King occupant la majeure partie de ma tête, c'est tout naturellement que j'ai commencé à écrire une nouvelle dans le style de King, en général, et des Langoliers, en particulier, (alors que je n'avais pas encore lu cette nouvelle).
L'ensemble de mon lectorat de l'époque fût conquis (un pote et ma soeur, personne d'autre n'a lu cette nouvelle avant que je ne la dépose sur le net bien des années après ou qu'elle soit publiée, plus récemment, dans le recueil "Chaîne de vies" disponible ici) et cela m'encouragea à aller plus loin. Je me suis alors mis à écrire une petite nouvelle pour la naissance de ma nièce et ma soeur m'encouragea à la développer ce qui finit par donner mon premier roman "Nibelungen, L'Enfant de la Brume".
A l'époque, l'écriture était une véritable torture. Je me forçais à écrire tous les jours, plusieurs pages, le tout dans une souffrance mentale assez étrange. Une sorte d'écriture masochiste à laquelle je ne pouvais échapper. Si je n'écrivais pas, cela me hantait, si j'écrivais, cela me retournait. La hantise de la page blanche planait sans cesse en me glaçant le sang et lorsqu'elle s'imposait à moi, il n'y avait pire moment à vivre.
Je continuais ainsi avec un deuxième roman accouché dans une souffrance similaire. Désireux de me séparer de cette douleur permanente, j'essayais de ne plus écrire, épuisé mentalement par "Le Berceau du Christ" ce deuxième roman que j'avais eu tant de mal à terminer, je pensais alors que cet acte avait vampirisé tout mon besoin d'écrire. Mais il me fallut me rendre à l'évidence que non, quand, quelques temps après, un film hanta chacune de mes nuits durant des mois. Je rêvais, je voyais, chacune des scènes, chaque personnage, chaque plan, quasiment chaque dialogue, chaque séquence. Du générique de début, jusqu'à celui de fin, je revoyais toutes les nuits le même film qui, en plus de m'obséder par sa présence, m'obsédait également par sa qualité.
Voyant que cette obsession nocturne ne passait pas, je me suis rendu à l'évidence qu'il me fallait la coucher sur papier pour m'en débarrasser. C'est ainsi que j'ai écris mon premier et seul scénario "Pour la Peau d'une Autre".
Effectivement, quand j'ai eu fini d'écrire cette histoire, elle libéra mes songes. C'est ainsi qu'également j'ai réussi à me débarrasser de ma tristesse suite au décès de mon grand-père. C'est en écrivant ce que je voulais lui dire et que je n'avais jamais osé, que j'ai pu avancer.
Bref, l'écriture est devenue pour moi, au fil du temps, comme une compagne qui ne cesse de me tourmenter mais dont je ne peux me séparer. Elle me procure des joies, mais aussi des peines, des satisfactions, mais également des tourments. Parfois j'ai envie qu'elle me fuit, mais quand je la sens loin, j'ai peur de vivre sans elle.
Mais tout cela c'était avant, avant les aventures de "Wan & Ted". Grâce à ces deux héros, l'écriture, pour moi, n'est plus que plaisir. Travailler et retravailler mes textes est devenu une obsession, mais une saine obsession. Une journée passée sans écrire est toujours une journée de gâchée mais lorsque j'écris quelques bonnes lignes, alors, la journée est belle.