L'âme du mal
Deuxième incursion dans le monde tourmenté de Maxime Chattam. Après avoir commencé ce voyage avec son dernier roman, « La conjuration primitive », qui m'a laissé un excellent souvenir, voilà que je poursuis par son premier roman, « L'âme du mal », premier opus de la « Trilogie du mal » selon Chattam (avec « In Tenebris » et « Maléfices »).
C'est l'occasion de découvrir de façon plus approfondie l'inspecteur Joshua Brolin qui fait une apparition à la fin de « La conjuration primitive ».
Joshua Brolin est un jeune inspecteur profileur qui a fait ses classes au FBI, mais qui s'est tourné vers la police afin de se confronter au travail de terrain.
« L'âme du mal : Abandonnés au fond de la forêt ou de hangars vétustes, des cadavres comme on n'en a jamais vu, mutilés de façon rituelle, porteurs de messages cabalistiques semblables à ceux que laissait derrière lui le Bourreau de Portland, avant qu'une balle dans la tête ne vienne à bout de sa carrière...
Le tueur serait-il revenu d'outre-tombe ? S'agit-il d'une secte particulière qui prélève toujours les mêmes morceaux des corps de ses victimes, pour d'étranges cérémonies ?
Des bibliothèques ésotériques aux égouts de la ville, l'inspecteur Brolin et une jeune étudiante en psychologie plongent dans une enquête infernale, tandis que la police scientifique et la médecine légale se perdent en conjectures.
Et peu à peu, des brumes mystérieuses de la Willamette River va surgir un secret effroyable que nos deux limiers devront affronter au péril de leur âme. »
Dans la première partie assez courte du roman, on découvre l'inspecteur Joshua Brolin de la ville de Portland, sur les traces de Leland Beaumont, un tueur en série qui a la particularité de brûler à l'acide le front des femmes qu'il assassine et de découper leurs bras pour les emporter.
Alors que Leland a enlevé une jeune étudiante en psychologie, Juliette Lafayette, et s'apprête à la tuer, Joshua débarque et tire une balle dans la tête du tueur qui décède sur le coup.
La seconde partie nous présente les mêmes deux personnages un an après. Joshua est en charge d'autres affaires et Juliette reconstruit sa vie de son côté, sans avoir oublié son sauveur.
C'est le moment que choisit un psychopathe pour tuer des femmes avec le même Modus Operandi que Leland Beaumont. Il n'en faut pas plus aux journalistes pour s'intéresser de nouveau à Juliette et pour que celle-ci renoue avec Joshua, chargé de l'enquête.
Pourtant, tout indique que seuls Leland Beaumont et les enquêteurs étaient au courant du détail des meurtres que reproduit le nouveau tueur. Sachant que Leland Beaumont s'intéressait de très près à l'occulte, la peur que celui-ci soit revenu du royaume des morts commence à s'infiltrer dans l'esprit pourtant très cartésien de Brolin et de son équipe.
Ce premier roman de Maxime Chattam, écrivain français, se déroule à Portland, aux É.-U.. Ce choix est sans doute pour faire plus vrai, beaucoup considérant les É.-U. comme le berceau des tueurs en série et des profileurs, mais cela demeure un choix contestable.
Pourtant, force est de constater que Chattam met tout en œuvre pour rendre crédible son histoire en apportant des informations précises sur le profilage, les autopsies, le comportement des tueurs en séries et bien d'autres éléments de l'enquête.
C'est d'ailleurs ce choix qui permet au lecteur de s'accrocher à l'histoire, car, malgré une volonté de créer une histoire rocambolesque et crédible, Chattam ne fait que s'embourber dans une histoire bien conventionnelle.
Je ne m'attarderai pas sur tous les éléments censés faire croire aux lecteurs que le nouveau tueur est le fantôme ou la réincarnation de Leland Beaumont pour, au final, s'en sortir avec un retournement que l'on a trop souvent subi dans ce genre d'histoire, que ce soit au cinéma ou dans la littérature (je vous laisse découvrir cette révélation finale que vous pouvez retrouver dans un roman de J.C. Grangé, dans de multiples séries comme « Crimes en série » avec Pascal Légitimus » et bon nombre de films).
Mais, comment passer outre le poncif de l'enquêteur qui tombe amoureux de celle qu'il a sauvée ou qu'il doit protéger ou, plus largement, l'histoire du héros qui se tape l'héroïne ?
Car, si Joshua Brolin s'avère, au fil du livre, un personnage intéressant, sa relation avec Juliette parasite totalement le suspens de l'ouvrage et n'apporte rien du tout. L'auteur aurait tout aussi bien pu faire participer cette étudiante en psychologie à l'enquête, et même la faire protéger par Joshua Brolin, sans que celle-ci soit forcément très belle et très attirante, et sans que Joshua s'en éprenne, comme de bien entendu.
Je pense même que la distance entre les deux personnages aurait rendu l'histoire plus attrayante que cette romance à l'eau de rose que l'on a trop l'habitude de découvrir dans ce genre de romans (il faut toujours que le flic tombe amoureux de sa coéquipière ou de la personne qu'il doit protéger).
Du coup, j'ai eu un peu de mal à entrer dans le roman (du moins bien plus que dans « La conjuration primitive » du même auteur) et il m'a fallu attendre un peu pour vraiment prendre du plaisir à suivre cette enquête. De même, la sensation que l'on allait me servir pour la énième fois la même révélation pour rendre possible l'impossible, a en partie dynamité ce même plaisir de lecture.
Pour autant, soyons juste, « L'âme du mal » est un premier roman, ou presque, et donc comporte certains tics de tout premier roman, dont celui de vouloir se démarquer des autres livres du même genre pour, au final, ne faire que trop s'en rapprocher.
Cependant, on peut déjà reconnaitre à l'auteur un certain talent de narration bien qu'il abuse des chapitres courts et qu'il alterne un peu trop rapidement entre les scènes pour dynamiser artificiellement son récit. On peut aussi le féliciter pour la maitrise des enquêtes et des profilages.
Au final, « L'âme du mal » est un premier roman tout à fait honorable, mais qui ne révolutionne pas le genre. L'auteur met en place un personnage intéressant, mais pas tout à fait abouti et une histoire qui se veut originale, mais qui utilise trop souvent de grosses ficelles du genre. Pour autant, on peut être assuré que les prochains romans de Chattam seront mieux maitrisés et seront encore plus plaisants à lire.