Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Loto Édition
3 juillet 2016

Le Valet de pique

valetComme vous le savez déjà si vous lisez régulièrement les articles de ce blogue, en tant que lecteur, auteur et éditeur, je ne navigue que dans les eaux sombres du polar. Pour autant, je suis très éclectique dans mes lectures, du moment que le polar est là, tout me va... ou presque.

Si, en plus de mes avis de lectures, vous avez lu mes articles sur l'édition sous toutes ses formes, vous savez déjà que je n'ai rien contre l'auto-édition, le nom de mon blogue parodiant d'ailleurs cette forme d'édition.

L'auto-édition apporte sa pierre à l'édifice de la littérature actuelle (même si ce fût déjà le cas par le passé, les techniques d'impressions récentes favorisent l'essor de cette pratique, et le numérique également) tout comme toutes les autres formes d'édition.

Je n'ai donc aucun mal à me laisser tenter, parfois, par un roman n'étant pas passé par les mains d'un professionnel de l'édition, du moment que le sujet m'attire.

Le Valet de pique : Assassinats et enquêtes mystérieuses. Léo Warold vient de passer ses examens pour enfin devenir inspecteur à Chicago. On lui présente son nouvel équipier George Mills, un ancien du commissariat. Les deux hommes apprennent alors à se connaître sur une première scène de crime : la femme, Alice Troy, est assassinée dans sa baignoire. Son mari est interrogé, mais les deux inspecteurs de police ont du mal à trouver une véritable piste. Fight Club, Man on Fire, Forest Gump... Autant de films qui sont pour l’inspecteur Warold et son coéquipier une manière complice de s’amuser. Seulement lorsqu’un homme est retrouvé mort à Lane Beach Park avec un valet de pique dans la bouche, le jeu des cinéphiles prend une toute autre tournure. Qui se cache derrière donc derrière cette carte mystérieuse ? Un polar noir dans la grande tradition du genre.

Si ce très court roman de Florian Payraudeau avait de quoi m'intéresser avec les multiples références apparentes au cinéma que j'affectionne, le fait qu'un « amateur » se laisse aller, comme ses pairs, à naviguer en terre américaine, pour faire plus « genre », avait de quoi me laisser dubitatif. Seule une lecture pouvait me permettre de trancher... ou pas.

... Ou pas, car, même si je décidais d'entamer la lecture de ce court roman afin de me faire une idée, la lecture ne dura pas suffisamment pour me faire une réelle idée du traitement du sujet, de l'histoire, de son dénouement.

Avant tout, je tiens à préciser que, si j'écris beaucoup, je ne suis pas à l'abri des fautes d'orthographe, loin de là. Mes écrits sont ponctués de fautes, raison pour laquelle je passe par la meilleure des correctrices pour pouvoir offrir aux lecteurs un résultat dénué de toute agression à ma bonne langue française.

Certes, je suis, en parallèle, aussi éditeur et je ne peux m'empêcher, à toute lecture, même celle de loisir, d'avoir un œil critique. Pour autant, quand le texte est plaisant, mon esprit critique s'affaiblit et inversement.

Premier chapitre, premier léger choc. Un style un peu lourd, une volonté trop présente de faire « Polar américain » et trois répétitions en deux paragraphes (ne cherchez pas, je suis devenu un obsédé des répétitions, déformation professionnelle oblige).

Quelques paragraphes plus loin, les changements intempestifs de temps de conjugaison m'agressent les rétines. Présent, imparfait, passé simple, passé composé, tout y passe, sans que cela ne soit justifié ni par la narration ni par le style.

Pas le temps de terminer cette réflexion temporelle que je suis attaqué par une faute énormissime - « L’interdiction de fumé » - me frappe de plein front.

Même pas remis de l'assaut qu'un - « Tout de suite deux choses me choc » - se jette sur moi. Je me dis alors que l'auteur a délaissé un paragraphe pour une raison lambda et qu'il va tout de suite se reprendre, mais la phrase suivante va me contredire avec un double uppercut - « sa voix est roque comme un son de gravier » - qui, outre une métaphore de mauvaise facture, m'envoie une faute supplémentaire.

Comme les assauts se succèdent avec, toujours, plus de fougue, je survole, sans en prendre note, des tournures de phrases issues d'une langue parallèle telles - « l’homme qui me faisait dos » - et sur la ponctuation hésitante, voire, inexistante...

Grand bien me prit puisque la bataille ne faisait que commencer. L'agression de la langue continuait avec un - « Si son visage portait les stigmates d’une longue carrière bien remplis, sa carrure était à l’antipode de cela. » - mêlant faute d'orthographe et faute de style.

Trois lignes plus tard, je ne faisais même plus cas d'un - « repris Dito ».

Trop anesthésié par la douleur, l'ultime affront de ce premier chapitre - « Sans un mot Mills prit la pochette de documents que lui tendit Dito et se dirigea vers la sortie. J’emboîte le pas immédiatement. » - n'altéra point mon esprit même si l'on est en droit de se demander la raison de s'affranchir du passé simple pour plonger sur le présent ???

Comme je suis d'humeur magnanime et optimiste, je laisse sa chance au second chapitre, espérant qu'il relèvera le niveau - « Seulement dix minutes nous séparent du commissariat de la scène du crime, et pourtant le temps me paraît beaucoup plus long. Dans la voiture, le silence règne, pas un mot, seulement la radio de police qui l’interrompt de temps en temps de message presque indescriptible. » -

J'ai bien du mal à occulter le fait que dans le monde de l'auteur, une distance puisse se compter en minutes (ce serait plutôt le temps nécessaire à franchir cette distance en question), que voulez-vous, plus je suis déçu et plus je suis acerbe, mais j'ai bien du mal à croire que la radio de police diffuse, régulièrement, le même message indescriptible puisque le pluriel n'a, ici, pas cours.

Je chancelle, sens qu'une ultime goutte d'eau sera suffisante à faire déborder mon vase et, à défaut de goutte, c'est une averse qui m'agresse - « Nous sortons de la voiture et nous entrons dans le bâtiment. Une belle résidence de trois étages. Dans le hall de la résidence, moins luxueux que sa façade, quatre policiers en uniforme bloque le passage à une dizaine de personnes qui attendent sûrement pour rentrer chez eux après que les policiers sont recueillis leurs précieux témoignages. » -

Allez, je ne fais pas cas des répétitions (résidence) et passe directement à une question existentielle : luxueux ne s'accordant pas avec résidence, puisque de genre différent, l'adjectif ne peut s'accorder qu'avec le hall, du coup, « sa façade » se rapporte également au « hall » et, admettez avec moi, un hall qui possède une façade, voilà qui n'est pas courant. Les quatre policiers forment un bloc puisque le verbe est au singulier. En attendant, attendent des personnes ou bien est-ce la dizaine qui attend, toujours est-il que l'un comme l'autre étant féminin, aucun ne peut rentrer chez « eux ».

Enfin, coup de grâce, de grasse, devrais-je dire, devant la lourdeur du texte - « les policiers sont recueillis leurs précieux témoignages » - déjà que les flics étaient plusieurs tout en étant un, les voilà recueillis par on ne sait qui, mais sûrement pas par les témoignages.

J'étais groggy, K.O. debout, la maltraitance littéraire que je venais de subir avait eu raison de ma raison. J'étais un lecteur abattu dans tous les sens du terme.

Je ne vous surprendrais pas en vous disant que j'arrêtais là ma lecture et que jamais je ne connaîtrais la résolution de l'enquête, mais, comme je m'étais arrêté avant même la présentation du premier crime, la frustration n'avait guère de chance de me gagner.

Alors, bien sûr, je suis un peu sarcastique et d'aucuns diront que je suis même assez méchant envers cet auteur, que je ne cite qu'à regret, qui n'a rien demandé.

Justement, si ! L'auteur demande 2.99 euros pour son ouvrage et c'est là que le bât blesse. Si l'auteur s'était contenté de mettre en ligne son texte gratuitement, via Amazon, comme il l'a fait, ou par l'intermédiaire d'un blogue quelconque, jamais je ne me serais permis un tel traitement. Mais, à partir du moment ou l'auteur « amateur » réclame, pour un texte aussi court et, surtout, si peu travaillé, une somme égale ou supérieure à celle de nombreux romans ayant nécessité le travail et le savoir-faire de petits éditeurs (les gros éditeurs pratiquant des prix prohibitifs), le lecteur est en droit de s'attendre à un minimum de travail sur le texte qu'il vient d'acheter.

Alors, oui, comme je le disais, tout le monde ne maîtrise pas parfaitement l'orthographe, moi le premier (dites-vous que j'ai dû laisser passer de nombreuses fautes), un auteur peut, à moindres frais, limiter les erreurs avec le correcteur de son traitement de texte favori ou bien, moyennant quelques dizaines d'euros (qui seront récupérés grâce aux ventes du livre), en achetant un correcteur orthographique un peu plus évolué comme « Antidote » ou autre.

Certes, ces logiciels ne sont jamais une solution idéale et ils ne livreront que de bons résultats uniquement s'ils sont utilisés par des personnes maîtrisant déjà correctement l'orthographe et la grammaire, mais ils permettent, même dans les mains de néophytes, de limiter la casse et d'éviter la plupart des fautes grossières que j'ai prises en exemple.

Sinon, il reste toujours la possibilité de s'appuyer sur des bêta-lecteurs en proposant gratuitement son texte en échange d'un avis ou bien des forums d'écrivains amateurs sur lesquels s'entraident, se lisent, se corrigent, ce qui permet, même sans atteindre la perfection, d'améliorer à la fois son texte, mais aussi sa façon d'écrire.

Au final, un court roman, d'autant plus court que je n'ai pas dépassé le début du second chapitre à cause de fautes d'orthographe trop nombreuses, de lourdeurs de style et autres joyeusetés du même genre qui ont été rébarbatives.

 

P.S. : Après visionnage plus précis de la couverture du livre et la découverte d'un pseudo nom d'éditeur (Publishroom), je suis obligé, semblerait-il, d'adresser mes critiques, non pas à l'auteur, mais à Publishroom, si je tiens compte des trois offres de publication proposées par cette « maison d'auto-édition » (voilà un non-sens sur lequel je reviendrai), puisque chacune contient, en échange de plusieurs centaines d'euros, des services de « relecture, critique et conseils personnalisés sur les manuscrits » et une « correction orthographique, syntaxique et typographique ».

Si l'auteur est passé par un de ces services, alors, ce n'est pas que le lecteur qui s'est fait avoir, mais l'auteur lui-même, car il est évident que le travail n'a pas été fait.

Enfin, le terme de « maison d'auto-édition » tel que proposé par Publishroom, est une aberration. Maison et auto-édition s'opposent, auto-édition et payer des centaines d'euros pour être édité également. Au final, un sujet supplémentaire qu'il me faudra traiter dans une catégorie ad hoc de ce blogue.

P.S.2 : Il semblerait que le texte ait été corrigé depuis, éliminant une partie des fautes dont je parle plus haut (Cependant, « LE sucrière » demeure toujours dès le début de l'histoire).

Publicité
Commentaires
Loto Édition
Publicité
Loto Édition
  • Parce que l'édition est une véritable loterie dans laquelle il y a beaucoup d'appelés et très peu d'élus, il est grand temps que quelqu'un mette sa plume dans la fourmilière afin de faire connaître aux lecteurs la cruauté du milieu du livre !
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Derniers commentaires
Archives
Pages
Publicité