1 + 1 = 3
« 1 + 1 = 3 »... Non, je ne vais pas disserter sur une déclaration de Jean-Claude Van Damme mais sur un titre de Maurice Boué, un court roman dans lequel apparaît le personnage du Détective Lautrec dont je vous ai déjà parlé.
Maurice Boué... Je vous invite à relire ma chronique sur « Le signe sanglant », du même Maurice Boué, avec le même détective Lautrec, pour mieux cerner la question.
D’une série qui devait compter trois titres (dans la première réédition), nous aboutissons donc à une série à 7 titres (après décryptage des différentes éditions des textes de l’auteur), dont « 1 + 1 = 3 » est le quatrième titre.
1 + 1 = 3 : Le détective Lautrec reçoit une lettre de M. Mulford le suppliant de se rendre Villa des Hiboux afin de le protéger contre des ennemis inconnus en voulant à sa vie. Sur place, Lautrec et son fidèle ami découvrent un cadavre qui se révèle vite ne pas être le propriétaire des lieux. Dans les poches du cadavre, une lettre sur laquelle apparaît l’adresse d’un dénommé Prosper Durail ! Les deux enquêteurs se rendent à destination pour y trouver le cadavre du locataire ! Seulement, les voisins et le concierge assurent que M. Durail vient de quitter l’appartement, sous leurs yeux et qu’ils l’ont tous reconnu aussi bien au physique qu’à la voix. De plus, il est impossible que M. Durail ait pu revenir chez lui pour y mourir. Il est de plus en plus probable que M. Mulford et M. Durail ne fassent qu’un. Or, il existe un autre Durail. L’équation de cette affaire se heurte alors à l’impossibilité mathématique :
1 + 1 = 3 !
Le détective Lautrec fait des mathématiques il faut bien avouer qu’il est bien plus doué en tant qu’enquêteur qu’en tant que mathématicien.
Et faut-il qu’il soit très doué pour démêler cette affaire très étrange.
Une personne qu’il ne connaît pas fait appel à lui, car elle craint pour sa vie. Quand Lautrec se rend chez elle, il découvre un cadavre qui, il le devine rapidement, n’est pas l’homme qui lui a écrit. Mais, dans sa poche, il trouve une enveloppe avec l’adresse d’un autre gus qui se trouve être mort, mais dans des circonstances étranges. Effectivement, les voisins du défunt sont sortis sur le palier en entendant des bruits de dispute et ont vu partir la personne en question. Mieux, le concierge lui a parlé et l’a vu attendre un taxi dehors. Pourtant, quand la blanchisseuse entre dans l’appartement dont la porte est entrouverte, elle trouve cette même personne morte. Et, il est impossible que celui-ci soit revenu par un autre chemin chez lui, impossibilité matérielle et temporelle.
Du coup, si l’homme qui a écrit la lettre est le même qui est mort dans l’appartement, et donc, que celui qui a quitté les lieux, une seule personne en ferait trois, d’où : 1 + 1 = 3 !!!
Comme toujours, Lautrec se trouve mêlé à des affaires très étranges où tout semble nager dans le surnaturel et, comme vous pouvez le deviner, le détective démontrera, à la fin, que tout est explicable.
Il faut avouer que l’auteur avait beaucoup d’imagination pour mettre en place ces situations abracadabrantesques, et beaucoup de talent pour les faire passer auprès des lecteurs et rendre l’ensemble délectable.
Plus encore, il parvient à nous faire apprécier un personnage qu’il n’a pourtant dépeint que très succinctement. Pire, son partenaire, parfois, n’est même pas nommé. Et pourtant, on apprécie le détective autant que ses enquêtes.
Car, en moins de 20 000 mots, Maurice Boué met en place toute une toile d’araignée là où les auteurs contemporains ont besoin de 600 pages.
Bien évidemment, quand on connaît le détective Lautrec, on se doute que tout restera dans le domaine cartésien même si tout semble démontrer le contraire. Aussi, le lecteur va s’esquinter les méninges pour savoir comment l’auteur et le détective vont réussir à tout expliquer.
Le détective Lautrec, même quand il n’a aucune piste, laisser à penser qu’il a déjà tout compris, ce qui peut le mettre, parfois, dans des situations périlleuses (voir « Le signe sanglant »).
L’histoire est tordue à souhait, dans l’esprit des thèmes de son époque, et l’écriture n’est pas dénuée d’humour même si celui-ci est moins prononcé que dans d’autres titres de l’auteur.
Au final, encore une bonne enquête du détective Lautrec, un personnage que l’on cerne difficilement, mais qui emporte l’adhésion du lecteur. Une excellente lecture, donc.