On a tué Lilian
Je retrouve avec un immense plaisir la plume de Maurice Lambert et l’un de ses personnages récurrents, le commissaire Mazère avec « On a tué Lilian », un fascicule de 32 pages, double colonne, paru en est 1944 dans la « Collection Rouge » des éditions Janicot.
Pour rappel, Maurice Lambert, de son vrai nom Géo Duvic (1900 - 1968) fut, en plus d’auteur de littérature fasciculaire, journaliste et chansonnier.
Dans son œuvre, on remarquera quelques personnages récurrents qui sont tous apparus dans la collection de chez Janicot, mais dont les aventures, parfois, se sont exportées vers d’autres collections d’autres éditeurs comme « Police Express » des éditions A.B.C., « Énigma » des éditions Nicéa ou bien la collection « Main Blanche » des éditions S.P.E.
Parmi ceux-ci, on appréciera le détective vieillissant A.B.C. Mine, sûrement le plus original du cheptel ; l’inspecteur Machard (ou encore le commissaire Garnel dont je n’ai découvert que deux aventures, ce qui m’empêche, encore, de l’appeler « récurrent ») et, bien évidemment, le commissaire Mazère.
Pour ceux et celles qui n’auraient pas lu mes autres chroniques sur les récits de l’auteur, déjà, je dirai que ce n’est pas bien de délaisser ma prose, d’autant que je tente de faire revivre une littérature d’autrefois qui le mérite bien amplement, et un format (le fascicule) qui n’a malheureusement plus court. Ensuite, je préciserai alors que je tiens Maurice Lambert pour un esthète du format fasciculaire, pour l’un des maîtres en matière de fascicule policier, un écrivain parvenant à tirer la quintessence d’un format très contraignant dans lequel peu d’auteurs sont parvenus à s’épanouir.
ON A TUÉ LILIAN
Le commissaire MAZÈRE espérait passer de tendres vacances avec son épouse, Angèle, dans une auberge du petit village de Marlay.
Mais c’était sans compter sur une troupe de comédiens venue en tournage dans la région et logeant dans l’hôtel choisi par le policier.
Heureusement, la java du soir est la dernière, celle qui fête la fin des prises de vue. Demain, le calme sera revenu.
Seulement, durant la nuit, on a tué Lilian Bell, l’actrice vedette, la star célèbre et adulée.
Et devinez à qui le gendarme du bourg, le juge d’instruction et même la mère du principal suspect vont demander de mener l’enquête ? Au commissaire MAZÈRE, bien évidemment.
Finis les congés pour le couple… du moins, jusqu’à ce que l’assassin soit sous les verrous…
Le commissaire Mazère et son épouse Angèle sont en vacances dans un hôtel d’un petit village.
Mais, difficile de dormir, des comédiens font la java, en bas, à boire et à chanter à tue-tête pour fêter la fin du tournage.
Heureusement, le lendemain, ils auront la paix, car les acteurs seront partis.
Sauf que le lendemain, l’actrice principale, Lilian Bell, est retrouvée morte devant chez le notaire avec qui elle flirtait la veille.
Il n’en faut pas plus pour le gendarme pour suspecter le notable bien qu’il eut préféré refiler l’affaire à Mazère qui a sèchement refusé. Les vacances, c’est fait pour se reposer, pas pour bosser.
Quand le juge d’instruction vient demander à son tour, au commissaire, de prendre l’affaire en main, celui-ci refuse encore, mais moins sèchement.
Et quand la mère du notaire, persuadée de l’innocence de son fils, vient supplier Mazère de mener l’enquête, Mazère finit par craquer et accepte au grand désespoir de son épouse.
Désespoir ? Pas si certains, tant tout cela amuse Angèle.
En tous cas, plus de vacances tant que le meurtrier ne sera pas sous les verrous.
Il me serait difficile de décrire le plaisir que j’ai à retrouver la plume de Maurice Lambert, qui s’apparente un peu à celui de revoir un bon ami avec qui on s’entend bien.
Car je m’entends bien avec Maurice Lambert, du moins avec ses récits, n’ayant, jusqu’à présent, jamais été déçu par ceux-ci.
Et pour cause, comme je le disais en préambule, je considère Maurice Lambert comme l’un des tout meilleurs auteurs de fascicules policiers de 32 pages, un format dont la concision est un écueil pour la plupart des écrivains.
Effectivement, dans un récit de 10 000 à 14 000 mots, il est difficile d’insérer dans un récit policier tous les éléments inhérents au genre.
La plupart des écrivains se contentent alors d’un service minimum, proposer une intrigue basique, des personnages sans saveur et un style lambda.
Alors que Maurice Lambert, lui, chaque fois, cherche à offrir (ou plutôt à vendre) aux lecteurs un roman policier en condensé au lieu d’un simple récit policier.
Pour ce faire, et ce avec un minimum de mots, il tente de proposer des personnages, si ce n’est originaux, au moins un peu plus aboutis que d’ordinaire. Ici, c’est la relation de couple et notamment le caractère de la femme qui apporte cette petite touche. Double touche, même, car son espièglerie est source d’humour et de sourire.
Pour ce qui est de l’intrigue, bien évidemment, ne vous attendez pas à un suspens haletant digne des meilleurs romans de Jean-Christophe Grangé ou Franck Thilliez, Maurice Lambert n’a pas 600 pages pour développer son histoire, seulement 32.
Pourtant, si l’intrigue est relativement simple, l’auteur n’oublie pas de proposer quelques fausses pistes, différents suspects, et il faut attendre la toute fin pour connaître l’identité du coupable et son mobile.
De plus, l’auteur, comme souvent, distille subtilement quelques éléments pouvant mettre sur la piste et qui, pour ceux n’ayant pas découvert le pot aux roses, leur feront dire, « Ah, oui, c’est la raison de tel ou tel comportement ! ».
Quant au style de Maurice Lambert, il est au diapason du reste, c’est-à-dire que l’auteur ne cherche jamais à en faire trop, il se contente de faire « juste ». Une plume déliée, une narration maîtrisée, une touche d’humour, quelques critiques bien senties, et emballez, c’est pesé.
Chaque fois que je découvre un texte de Maurice Lambert, je me dis, « vais-je, pour une fois, être déçu ? », mais non, jamais, dès les premiers mots, je suis embarqué et mon plaisir ne trouve son point final qu’au point final du récit.
Merci, Monsieur Maurice Lambert.
Au final, un épisode tout aussi savoureux et plaisant que les précédents et que tous les récits policiers que j’ai pu lire de l’auteur.