La villa des suspects
Je poursuis ma découverte de la plume de Lucien van der Haeghe, un auteur sur lequel je n’ai guère d’informations si ce n’est qu’il était actif dans les années 1940 et qu’il était probablement de la région Nord, comme l’attestent ses collaborations avec l’auteur et éditeur lillois Jean des Marchenelles…
La rencontre avec un auteur, dans mon cas, n’est jamais meilleure que si elle est faite par l’entremise d’un personnage récurrent.
Cela tombe bien, L. Van der Haeghe, pour la « Collection Rouge » des éditions Janicot, a développé deux enquêteurs qui se croisent (ou pas) dans plusieurs enquêtes : le commissaire Barma et son ami d’enfance le célèbre détective Paul Duval.
Les deux personnages apparaissent dès 1943 dans le fascicule de 32 pages, double colonne, « La voix d’outre-tombe » et reviennent ensemble ou séparément dans 5 ou 6 autres récits (un titre de l’auteur échappe encore à mes griffes avides).
« La villa des suspects » est un titre de la « Collection Rouge » des éditions Janicot dans lequel apparaissent Barma et Duval.
LA VILLA DES SUSPECTS
Le détestable, l’égoïste, l’avare, le cynique, le sournois, mais richissime Jean Bernaldo, réunit autour de lui sous prétexte d’une partie de chasse, toute sa famille et son ami le substitut Roël.
Au cours du repas du soir, il annonce à chacun qu’il les a couchés sur son testament…
Et le lendemain matin, il est retrouvé mort dans son lit, le crâne fracassé…
Le commissaire BARMA chargé de l’enquête est rapidement convaincu que le coupable est à chercher dans les héritiers de la victime, mais les suspects ne manquent pas.
Ne parvenant pas à trouver des indices probants, il ne tarde pas à faire appel à son grand copain le détective Paul DUVAL…
Jean Bernaldo est un homme guère apprécié des autres membres de sa famille, mais il possède une grosse qualité, il est riche. Aussi, quand il invite tout le monde dans sa demeure pour une semaine de chasse, personne ne manque à l’appel, pas même son ami le substitut Roël, qui, pourtant, avait une importante affaire à préparer.
Le soir, Jean Bernaldo, au cours du dîner, prévient chacun qu’il l’a couché sur son testament, faisant le bonheur de tous.
Mais, le lendemain matin, Jean Bernaldo est retrouvé le crâne fracassé dans son lit…
Le commissaire Barma va débuter son enquête et, bien qu’il se doute que le meurtrier se trouve parmi les invités et donc les héritiers, il ne parvient pas à trouver qui est le coupable.
Aussi va-t-il faire appel à son ami le détective Paul Duval…
Lucien van der Haeghe nous propose dans ce court récit de 9 800 mots, une intrigue une nouvelle fois inspirée de l’univers d’Agatha Christie. Une demeure isolée, des invités, un maître de céans détesté qui meurt durant la nuit. Qui est le coupable ? Un des invités, bien évidemment.
Dès les invitations lancées à la famille, on se doute du déroulement de l’histoire.
Cela ne gêne en rien puisque le texte se veut une parodie d’un genre dont tous les lecteurs possèdent les codes.
D’ailleurs, celui-ci se termine en « Whodunit », c’est-à-dire par une scène où l’enquêteur réunit tous les suspects et, expliquant le cheminement de sa pensée, finit par accuser le coupable devant tout le monde.
Rien de neuf, donc, dans le monde du polar, mais ce récit ne se veut pas novateur, mais plutôt hommage ou, au moins, inspiré par les maîtres du genre.
Malheureusement, la concision inhérente au genre ne permet pas de distiller savamment tous les éléments permettant de garder le lecteur à distance de la solution tout en lui soumettant pourtant des indices de-ci, de-là, pour s’en approcher.
Ici, le seul indice donné permet déjà au lecteur, avant même la découverte du corps, de deviner l’identité du ou de l’un des coupables.
Dommage, mais on ne peut demander à un auteur de faire des miracles et de parvenir en 10 000 mots à faire aussi bien que ses confrères qui disposent de 10 ou 20 fois plus de place pour cela.
On regrettera également quelques incohérences ou, du moins, légèreté dans l’enquête du commissaire Barma qui, aux yeux du lecteur, paraîtra piètre policier.
Mais là encore, on peut mettre tout cela sur le compte de la concision.
Reste alors un récit plaisant, sous forme de parodie légère (dans tous les sens du terme).
Au final, un récit qui reprend les codes si chers à Agatha Christie, mais qui, de par la courte taille du texte, ne parviendra forcément pas au niveau des romans de celle-ci.