Le visiteur inconnu
Bon, je vais faire court, car je vous ai déjà énormément parlé de Henry Musnik en chroniquant quelques-unes de ses nombreuses séries.
Henry Musnik (1895-1957) est né au Chili. Pourtant, il est devenu journaliste sportif, en France, mais aussi et surtout l’un des principaux pourvoyeurs de la littérature fasciculaire entre 1930 et sa mort…
Sous de très nombreux pseudonymes (Claude Ascain, Alain Martial, Pierre Olasso, Jean Daye, Pierre Dennys, Gérard Dixe… et bien d’autres), il signa un nombre incalculable de fascicules pour la plupart dirigés vers les genres aventures ou policiers.
Il fit les beaux jours des collections fasciculaires de 32 ou 64 pages de diverses éditions, dont, notamment, Ferenczi.
Pour ce faire, il développa plusieurs personnages récurrents, souvent inspirés de héros de la littérature populaire (Fantômas, Arsène Lupin, commissaire Maigret…), mais aussi des enquêteurs lambda, simples inspecteurs ou détectives (Gaspin, Michelot...)…
Le personnage du jour entre dans cette dernière catégorie : l’inspecteur Marcellin.
Marcellin apparut en 1941 (sous réserve de trouver d’autres titres mettant en scène le personnage) dans la collection « Police-Express » des éditions A.B.C. et vécut une demi-douzaine d’aventures dans cette même collection de fascicules de 32 pages ou dans d’autres (chez SAGEDI, par exemple), jusqu’en 1947.
« Le visiteur inconnu » est la troisième enquête de l’inspecteur Marcellin.
Elle est parue sous la forme d’un fascicule de 32 pages, en décembre 1942, dans la collection « Radio-Police » des éditions A.B.C. (une collection qui ne contient que 2 titres).
LE VISITEUR INCONNU
Il est assez rare qu’un assassin laisse son identité à l’accueil d’un hôtel en allant rendre visite à sa future victime.
Et pourtant…
L’inspecteur MARCELLIN, chargé de l’enquête sur le décès de Madame Timeron retrouvée morte étranglée dans son lit après le départ de son mari, est confronté à ce cas de figure peu banal…
Connaître le nom du meurtrier n’est pas suffisant, encore faudrait-il lui mettre la main dessus.
Mais celui-ci semble un adepte du jeu du chat et de la souris…
Reste à savoir quel rôle est dévolu au policier…
Madame Timeron a été étranglée, dans le lit de sa chambre d’hôtel, après le départ de son mari.
Fatiguée, elle avait refusé le petit-déjeuner servi par le garçon d’étage pour rester au lit. Son époux, lui, en avait profité pour aller se promener.
Peu après, un homme est monté voir Mme Timeron et est ressorti avec un paquet sous le bras.
Inquiet que Mme Timeron ne demande pas son encas, un responsable est entré dans la chambre avec son passe pour découvrir la femme morte dans son lit.
Le visiteur inconnu, pas si inconnu puisqu’il a laissé son nom à l’accueil, ne peut être que le meurtrier. C’est du moins ce que se dit l’inspecteur Marcellin chargé de l’enquête.
Mais, s’il connaît l’identité du meurtrier, il ne parvient pas à mettre la main dessus, celui-ci semblant jouer avec lui…
On retrouve donc l’inspecteur Marcellin dans une nouvelle courte enquête (8 600 mots), tout aussi plaisante à lire que les deux précédents.
Effectivement, si j’avais l’habitude de trouver les fascicules de 32 pages écrits par Henry Musnik un peu fades, force est de constater que ceux mettant en scène l’inspecteur Marcellin ne le sont pas du tout.
Certes, j’avais éventé totalement l’intrigue dès le début, devinant à la fois l’identité du meurtrier et la manière dont il s’y était pris… mais, peu importe, car, ce n’est pas dans un fascicule de 32 pages que l’on se plonge si on veut une intrigue surprenante et haletante…
Le texte est rythmé différemment de ceux habituellement écrits par l’auteur.
Les pensées ou réflexions de l’inspecteur Marcellin donnent un petit plus assez plaisant, étoffent l’ambiance et rythment le récit d’un bout à l’autre…
Le personnage de l’inspecteur Marcellin, bien que très peu décrit (la 50aine, des sourcils épais), semble avoir plus d’épaisseur que les autres héros musnikiens…
Du coup, malgré la grande concision du texte, une intrigue simple et plutôt linéaire, le plaisir de lecture est réellement présent, comme il l’est dans les deux premières enquêtes de Marcellin.
Il n’y a pas à dire, Henry Musnik ne finit pas de me surprendre.
D’abord, j’eus de lui, l’image d’un tâcheron qui écrivait tant et plus, mais dans aucun talent.
Puis, celle d’un honnête faiseur, qui produisait des textes pas trop indigents, mais avec toujours l’impression qu’il livrait le minimum syndical (notamment dans les fascicules de 32 pages).
En lisant les aventures de Jack Desly, je me suis dit que Musnik s’épanouissait mieux dans le fascicule de 64 pages, doutant toujours de ses talents d’écrivain.
En dévorant les aventures de Mandragore (de véritables romans), je fus convaincu qu’avec plus de latitude, l’auteur était capable de livrer de bons romans policiers.
Désormais, les enquêtes de l’inspecteur Marcellin me démontrent que Henry Musnik était également capable de performer dans le format très court du fascicule de 32 pages…
Quelle est la prochaine surprise que me réserve l’auteur ?
Au final, encore une bonne enquête de l’inspecteur Marcellin, très agréable à lire malgré une intrigue un peu trop prévisible (pour le lecteur d’aujourd’hui, tout du moins).