Le bandit invisible
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Tout le monde le sait (non ? Ah bon ! vous ne lisez pas toutes mes chroniques ?), je suis passionné de littérature populaire fasciculaire policière, un triptyque que l’on retrouvait principalement entre 1910 et 1960 dans nos frontières.
En effet, l’un des premiers éditeurs si ce n’est le premier, en France, à s’être lancé dans cette niche (qui n’en fut pas une, au final, pendant près d’un demi-siècle) fut Ferenczi.
Cet éditeur devenu mythique avec le temps se lança dans l’aventure vers 1907 en publiant la série « Marc Jordan », un détective français ayant pour but de concurrencer les aventures de son homologue américain Nick Carter, dont les traductions déferlaient avec succès en Europe depuis quelques mois.
Par la suite, Ferenczi poursuivit son travail fasciculaire en créant la collection policière « Le Roman Policier » vers 1916 (si mes souvenirs sont bons) qui proposa plus de 200 titres aux lecteurs.
Plus tard encore, vers la moitié des années 1930, Ferenczi créa les collections « Police et Mystère », « Police », « Crime et Police », puis, les années qui suivirent, « Police et Mystère - 2e série », « Mon Roman d’Aventure », « Mon Roman Policier » pour ne citer que les plus emblématiques du travail de l’éditeur.
Mais c’est dans sa première collection policier « Le Roman Policier » que l’on découvre souvent les plus belles pépites.
Déjà, parce que les auteurs ayant participé à cette collection faisaient parmi des plus prolifiques et intéressants de leur génération (Marcel Priollet, Paul Dargens, Georges Spitzmuller, Jean Petithuguenin, H.-R. Woestyn, Rodolphe Bringer...)
Ensuite parce que toutes les couvertures furent illustrées par le génial Gil Baer.
Enfin, parce que l’on retrouve un grand nombre de personnages récurrents dans cette foultitude de titres : Florac et La Glu, le commissaire Rosic, le journaliste Léonce Capoulin, le détective Luc Hardy, l’inspecteur Poncet, le détective Paddy Wellgone, et le duo formé par l’inspecteur Moulin et M. Ploc…
Et ce sont ces derniers qui nous intéressent aujourd’hui puisqu’ils sont les héros de « Le bandit invisible » de Jean Bonnery.
Sur Jean Bonnery (1887-1969), je n’ai pas grand-chose à dire si ce n’est qu’il fut également avocat.
Quant à Moulin et Ploc, on peut les retrouver (à condition de parvenir à mettre la main sur les fascicules) dans au moins 8 aventures.
« Le bandit invisible » semble être la 7e enquête.
Ce titre fut initialement paru dans la collection « Le Roman Policier » en 1922 et réédité 11 ans plus tard dans la collection « Police et Mystère ».
LE BANDIT INVISIBLE
L’inspecteur MOULIN est mandé par son chef pour une enquête chez les Serval après que le Procureur ait reçu une lettre de la part d’Anne Serval, accusant sa belle-sœur, Marguerite, d’empoisonner lentement son frère à l’arsenic.
Alors que les deux hommes discutent de l’affaire, le téléphone sonne. Au bout du fil, Marguerite Serval demande l’intervention de la police, car elle est certaine que son mari est en train de succomber à des doses de poison administrées par la sœur de celui-ci, Anne Serval…
MOULIN, devant l’originalité de la situation, fait appel à son ami M. PLOC, un vieux rentier qui l’a déjà aidé plusieurs fois à résoudre des cas épineux.
Entre Anne et Marguerite Serval, ils vont devoir déterminer qui est en train d’assassiner le pauvre Henri Serval…
Quand une jeune femme envoie une lettre au Procureur de la République pour accuser sa belle-sœur d’être en train d’empoisonner lentement à l’arsenic son mari, donc, son frère à elle, il est tout à fait normal que la police lance une enquête. C’est à l’inspecteur Moulin que l’affaire est confiée. Mais, alors qu’il est en train de recevoir ses ordres par le chef de la Sûreté, le téléphone sonne. C’est la fameuse belle-sœur au bout du fil qui demande à ce que la police intervienne, car la femme de son mari (celle qui a envoyé la lettre) est en train d’empoisonner lentement son époux…
Pour résoudre l’affaire, l’inspecteur Moulin s’adjoint l’aide de M. Ploc, un vieux monsieur perspicace qui lui a déjà apporté plusieurs fois assistance dans ses enquêtes…
Bon, ce n’est pas la première fois que j’ai affaire à l’inspecteur Moulin et M. Ploc.
À vrai dire, c’est la seconde fois.
La première me mettait face à leur dernière enquête alors que, là, c’est probablement l’avant-dernière enquête que je viens de lire (comme quoi je découvre leur carrière à rebours).
Je dois avouer que M. Ploc m’avait fait bonne impression lors de ma lecture précédente et que la plume de Jean Bonnery ne m’avait pas déplu. Mais, plus que cela, c’était surtout l’intrigue un peu tarabiscotée qui m’avait séduit.
En effet, alors, Moulin et Ploc avaient le choix entre deux coupables possibles et, au final, c’était une troisième solution qui s’imposait.
On retrouve ce genre de tiraillement dans cette histoire avec uniquement deux coupables possibles, deux femmes qui se détestent, seules ayant pu empoisonner le pauvre Henri Serval.
Moulin et, surtout, Ploc, vont-ils découvrir une troisième piste, comme dans leur affaire suivante ? Il vous faudra lire le titre pour le savoir.
Toujours est-il que, si M. Ploc s’avère un peu moins savoureux que dans ma précédente lecture, cela reste tout de même lui l’homme fort du duo et le personnage un peu atypique et original.
On pourra reprocher les rebondissements un peu redondants du fait que, à chaque fois que quelqu’un va leur donner la solution, il arrive un événement qui l’empêche de le faire, et aussi, pour être pointilleux, un détail (comme le mieux, à un moment, de l’état de santé de Henri Serval) qui ne colle pas vraiment avec la révélation finale.
Mais, replacé dans son contexte, c’est-à-dire un texte vite écrit et devant respecter les contraintes de concision du format fasciculaire, il faut bien avouer que ce récit est très agréable à lire.
Et ce d’autant plus que, contrairement à la plupart des récits fasciculaires de l’époque, celui-ci ne verse jamais dans le sentimentalisme à l’eau de rose et se concentre uniquement sur l’intrigue policière.
Au final, même à rebours, la découverte du duo formé par l’inspecteur Moulin et M. Ploc s’avère une bonne surprise et les épisodes suivants (précédents, donc) diront si celle-ci peut être excellente.