Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Loto Édition
8 septembre 2024

L'homme aux neuf vies

Un de mes créneaux, ces derniers mois, est de redécouvrir les premières femmes détectives de la littérature anglo-saxonne qui, contrairement à celle de l'Hexagone, n'en a jamais manqué puisque dès le début du genre policier, des auteurs ont mis en scène des femmes détectives, que ce soit dans des romans, des nouvelles ou des séries.

Et comme j'apprécie tout particulièrement les personnages récurrents, ce sont principalement les séries qui m'intéressent et plus encore les séries contenant des épisodes courts.

Après avoir découvert Lady Molly de Scotland Yard d'Emma Orczy, Hagar Stanley de Fergus Hume et Dorcas Dene de George R. Sims, me voilà parti sur les traces de l'une des plus intéressantes femmes détectives de cette période, j'ai nommé Miss Madelyn Mack.

Pourquoi Madelyn Mack est-elle plus intéressante que la plupart de ses autres consœurs ?

Déjà parce qu'elle fut inspirée à son auteur, Hugh C. Weir (1884-1934), par une véritable femme détective, Mary Holland (1868-1915) qui fut l'un des premiers enquêteurs à saisir toute l'importance des empreintes digitales et à faire la promotion de cette science.

Ensuite, parce que les méthodes de Madelyn Mack sont plus basées sur la science, l'observation, la réflexion, que sur l'inspiration et l'émotion comme la plupart des autres femmes détectives de la littérature l'époque.

Le premier épisode de la série (qui en compte 5) est à ce point significatif puisque Madelyn Mack aura à résoudre un crime en chambre close.

L’HOMME AUX NEUF VIES

Madelyn MACK, la célèbre détective, reçoit un matin une lettre émanant du grand éditorialiste Wendell Marsh, lui demandant de venir à son secours, car sa vie est en danger et qu’il a déjà échappé à plusieurs attentats.

Madelyn MACK part immédiatement en compagnie de son amie, la journaliste Nora Noraker.

Mais, arrivées sur place, les deux femmes sont accueillies par un shérif : Wendell Marsh a été découvert mort dans son bureau.

Madelyn Mack est une détective dont la réputation n'est plus à faire.

Un matin, elle reçoit un courrier signé par un grand éditorialiste qui l'appelle à l'aide, car il a été victime de 8 tentatives d'assassinat.

Madelyn Mack décide de se rendre immédiatement chez cet homme, mais quand elle arrive à destination, celui-ci a été retrouvé mort, dans son bureau fermé à clé, bureau dans lequel tout a été saccagé.

Pour autant, aucune trace de coups, de blessures ou de poisons n'est trouvée sur ou dans le corps de la victime lors de l'autopsie...

Pour une première enquête (littéraire), Madelyn Mack a à résoudre non seulement un meurtre mystérieux puisque l'on n'arrive pas à déterminer les causes de la mort, mais également un crime en chambre close puisque le corps de la victime a été retrouvé dans son bureau fermé à clé de l'intérieur et que toutes les fenêtres étaient également fermées.

L'histoire nous est racontée par Nora Noraker, journaliste de profession et amie de Madelyn Mack.

Rien d'étonnant dans le choix d'une narration via l'un des personnages autres que le héros ou l'héroïne. On retrouve ce procédé dans les enquêtes de Sherlock Holmes et depuis, le succès de ces textes a forcément inspiré d'autres auteurs.

Ici, Nora Noraker joue donc le rôle de John Watson, à la fois amie de la détective, mais également historiographe.

Ce premier épisode et court récit (quasiment 12 000 mots) prend le temps, en quelques lignes, de présenter notre héroïne, par les yeux de Nora Noraker, listant pour le lecteur quelques-uns des succès de la détective.

Pour un premier épisode, aborder le crime en chambre close est à la fois audacieux et forcément intéressant puisqu'il s'agit là d'un des sous-genres de la littérature policière les plus appréciés.

D'ailleurs, on notera que si Hugh C. Weir aborde le crime en chambre close, s'il le double par un meurtre mystérieux, voire impossible (autre sous-genre), il le conclut par une scène à la Whodunit à la Agatha Christie dans laquelle la détective réunit les divers protagonistes de l'affaire pour raconter sa vision du crime et, à la fin, accuser le coupable.

Triple ambition, donc, pour un si petit récit.

On ajoutera quelques notes d'humour, notamment via le personnage du Shérif borgne qui ne cesse, tout du long du récit, de dire qu'il aimerait savoir où est passé le deuxième homme (celui avec lequel la victime s'est battue dans son bureau).

Madelyn Mack s'approche donc de Sherlock Holmes par ses méthodes d'observation, de déduction, d'analyse, d'utilisation de la science, mais également par certains de ses comportements comme un léger dédain, ne répondant pas aux questions de son amie ou faisant semblant de ne pas l'entendre, de lui donner des instructions sans lui expliquer ce qu'elle attend d'elle ou le pourquoi de ces instructions, mais aussi et surtout par son addiction...

Pour Madelyn Mack, sa drogue, c'est des noix de cola qu'elle consomme pour se stimuler intellectuellement et lutter contre la fatigue. Elle en porte toujours sur elle, contenues dans son médaillon.

Avec un pendant féminin à Sherlock Holmes, un crime mystérieux en chambre close, une fin à la Whodunit, il est évident que cette première enquête, ainsi que le personnage de Madelyn Mack avaient tout pour passionner le lecteur avide de récits courts.

Si ce fut bien le cas outre-Atlantique, forcément par manque de traduction, ce ne fut pas du tout le cas en France.

Si Madelyn Mack est inspiré d'une véritable détective, Mary Holland, il est fort probable que le personnage de Madelyn Mack soit d'abord apparu sur grand écran avant de se retrouver sur papier.

Effectivement, les premières traces du personnage littéraire datent de 1914.

Les 5 enquêtes de Madelyn Mack sont publiées dans le magazine « Macleans » dans le second semestre de 1914 alors qu'elles ont d'abord été regroupées dans un recueil paru en mai de la même année.

Les enquêtes, dans le magazine, sont illustrées par Mary V. Hunter.

Pour ce qui est du personnage cinématographique, il est interprété par l'actrice Alice Joyce (1890-1955) qui apparaît bien plus tard dans le film « Beau Geste », adapté d'un roman éponyme de Percival Christopher Wren dont j'ai déjà parlé pour sa série littéraire « Le Club des Salopards ».

Madelyn Mack apparaît dans deux moyens métrages d'une heure environ (au moins), d'abord en 1913 dans « The riddle of the tin soldier », puis en 1914 dans « The riddle of the green umbrella » tous les deux réalisés par Kenean Buel et écrits par Hugh C. Weir.

Quelques photos de ces films illustrent le recueil publié à l'époque.

Au final, « L'homme aux neuf vies » s'avère être un premier épisode plaisant et intéressant mettant en scène une détective à la fois plus complexe, plus travaillée, et plus proche d'un Sherlock Holmes que ses consœurs de l'époque. Et, à sa lecture, on commence à regretter qu'Hugh C. Weir n'ait écrit que 5 enquêtes pour Madelyn Mack.

 

Publicité
Commentaires
Loto Édition
Publicité
Loto Édition
  • Parce que l'édition est une véritable loterie dans laquelle il y a beaucoup d'appelés et très peu d'élus, il est grand temps que quelqu'un mette sa plume dans la fourmilière afin de faire connaître aux lecteurs la cruauté du milieu du livre !
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Derniers commentaires
Archives
Pages
Publicité