L'homme aux romans policiers
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Quand on recherche des romans policiers écrits par des femmes françaises au début du XXe siècle, on se retrouve souvent dans une impasse alors que le legs des femmes de lettres pour la littérature policière anglo-saxonne débute quasiment avec le genre policier et est suffisamment vaste pour que le lecteur n'ait que l'embarras du choix.
Chez nous, avant les années 60, le choix est drastique.
J'ai beau chercher dans ma petite cervelle d'amateur éclairé de la littérature populaire policière, avant Geneviève Manceron dans les années 1950, deux seuls noms me viennent à l'esprit (si vous en avez d'autres, n'hésitez pas à me les communiquer) : Miriam Dou-Desportes et Julliette Pary.
Malheureusement, l'une comme l'autre n'ont offert à la littérature policière qu'un seul roman issu de leurs plumes (la première était principalement traductrice de romans policiers anglo-saxons dont certains d'Agatha Christie et la seconde a écrit dans d'autres genres et a également traduit des romans policiers, dont certains d'Agatha Christie).
Si « La chance de l'inspecteur Masson » (1946) de Miriam Dou m'avait déçu, j'espérais bien me rattraper avec « L'homme aux romans policiers » (1933) de Julliette Pary.
L'homme aux romans policiers :
L’Homme aux romans policiers : Jim Joy n’a pas de chance. Auteur de romans policiers à succès, il sait écrire « à la manière de », mais il reste à la recherche de « son » style. Et May, la timide jeune femme dont il est amoureux est l’épouse fidèle de son demi-frère, Jonathan, le constable de Guilford, un homme incroyablement solennel et sentencieux. C’est alors que disparaissent, simultanément, de riches collectionneurs… avec leurs collections ; et l’une des disparitions s’est produite à Guilford. Jim accompagne Jonathan et se prend au jeu de l’enquête. D’autant qu’au fil de celle-ci, il rencontre une jeune femme séduisante, mais fort suspecte, qui ressemble à s’y méprendre à May… laquelle est pourtant bien chez elle. De Guilford à Londres puis de Paris à l’Océan, de gourou grand-voyant en pêcheurs bretons, par avion ou par bateau, Jim poursuit son enquête tout en cherchant à protéger cette May irréelle. Est-ce vraiment la bonne manière de trouver la vérité ?
Des rebondissements en série et une énigme vraiment surprenante font de cet excellent roman policier un agréable moment de lecture.
Jim Joy est un écrivain à succès. Malheureusement, il n'a du succès que lorsqu'il singe les romans policiers d'auteurs célèbres et il veut démontrer qu'il peut séduire en écrivant un roman à sa façon. Aussi, quand il a la possibilité de participer à une enquête sur l'enlèvement de collectionneurs, dirigée par son demi-frère, il se lance dans l'aventure en la considérant déjà comme son roman à venir...
Autant le dire tout de suite, dès les premières pages, cette lecture m'a fait penser à une autre, « Le masque aux yeux rouges » de H. J. Magog, paru en roman en 1933, bien que déjà publié en feuilleton dans un magazine à la fin des années 1920.
Ce roman fut-il une inspiration pour Julliette Pary ? Difficile à dire.
Mais toujours est-il que j'ai ressenti la même ambiance et que le sens de l'aventure et des rebondissements à foison sont communs aux deux ouvrages.
Car, si dans celui de Magog, il s'agissait de l'histoire d'un acteur de films d'action se retrouvant au sein de vraies fausses aventures qui étaient construites comme un film d'action, celui de Pary nous livre les aventures d'un écrivain menant son enquête comme s'il était dans un livre.
À part ce fait qui les rapproche, les deux ouvrages partagent surtout un rythme effréné de rebondissements, de faux semblants, de personnages qui ne sont pas ce qu'ils semblent être, de suspicions, de fuites, de voyages, de trahisons...
Bien évidemment, certains de ces rebondissements s'appuient sur de grosses coïncidences ou hasards, mais on ne pourra pas vraiment reprocher cela à Julliette Pary d'autant qu'en 1933, cette ficelle était souvent de mise.
Il faut donc passer sur cette facilité (ainsi que sur le côté un peu daté de l'intrigue et des personnages) pour apprécier le roman et, si on y arrive, alors, on peut apprécier ce roman rythmé dans lequel tout est fait pour livrer au lecteur son lot de rebondissements et de révélations.
Au final, un roman policier ancré dans son époque, qui a un peu vieilli, mais qui se lit avec un réel plaisir du fait que le lecteur est sans cesse en attente du rebondissement suivant.