Le dernier Banco

Jean Normand est un auteur de la littérature populaire fasciculaire que j'ai découvert il y a quelque temps avec sa série « Inspecteur Doublet à travers le monde ».

Le véritable nom de l'auteur est Raoul Lematte (1885-1956) et il travailla dans l'administration pénitentiaire en Guyane, ce qui l'inspira pour ladite série, mais également pour nombre de récits d'aventures se déroulant en Amérique du Sud et évoquant, souvent, les chercheurs d'or.

Mais l'écrivain s'est aussi essayé au genre policier (la série autour de l'inspecteur Doublet est plus à verser au genre " aventures ") à travers de nombreux récits dont le titre du jour : « Le dernier Banco ».

« Le dernier Banco » est un fascicule de 22 pages, publié en 1945 dans la « Collection Justicia » des Éditions Chanteclerc.

Le fait qu'il soit imprimé en petits caractères permet au récit de dépasser les 10 000 mots, la taille usuelle d'un fascicule de 32 pages.

LE DERNIER BANCO

M. Bourdas a été assassiné, en pleine nuit, à la sortie de son cercle de jeu, après avoir gagné gros.

Tout accuse Robert Préval, le jeune fils d'un riche constructeur automobile : ce dernier était présent au cercle et a beaucoup perdu face à la victime ; il avait demandé un prêt au directeur qui lui a été refusé ; et surtout, un revolver avec les initiales R. P. gravées sur la crosse a été retrouvé sur les lieux du crime.

Pourtant, M. Bourdas n'a pas été tué par balle, mais par étranglement.

L'inspecteur Morel, chargé de l'enquête, va devoir démêler une affaire dans laquelle tout le monde ment, et qui lui démontrera qu'une conviction, si forte soit-elle, ne suffit pas à faire libérer un innocent et encore moins à condamner un coupable...

Jean Normand nous convie donc à une petite histoire policière qui vaut principalement pour son intrigue.

En effet, on sent que l'auteur a cherché à rendre son scénario malin, en offrant aux lecteurs de fausses pistes, un faux coupable, des rebondissements, des innocents qu'on ne parvient pas à faire libérer, des coupables qu'on ne réussit pas à faire enfermer faute de preuves directes, des suspicions, de fausses révélations, de véritables révélations, des interrogatoires...

Malheureusement, malgré cela l'intrigue est un peu cousue de fil blanc ou, du moins, enfile les passages convenus et fait tenir l'ensemble à coup de coïncidences heureuses (ou malheureuses, tout dépend de quel point de vue on se place).

Cependant, on peut tout de même gratifier l'auteur de tenter, en si peu de place, de proposer un canevas policier bien plus complexe qu'à l'ordinaire même si on regrettera qu'il ne se soit pas attardé sur l'aspect le plus intéressant de son histoire : l'impossibilité de faire arrêter des coupables faute de preuves directes...

Comme souvent dans le monde fasciculaire, les personnages ne sont qu'esquissés et entrent dans les moules habituels du genre : le fils de bonne famille joueur invétéré, les crapules qui n'hésitent devant rien pour l'argent, le policier pugnace qui ne s'arrête pas aux évidences, un mariage compromis...

Enfin, nul doute que « Le dernier banco » est une réédition puisqu'on trouve trace du même texte ou presque dès 1940 dans un magazine canadien, celui-ci ayant pour titre « Au Poker d'As »...

De là à imaginer, comme c'était très souvent (voire toujours) le cas, dans ce magazine, que le texte est lui-même la réédition d'un fascicule paru en France, il n'y a pas loin.

D'ailleurs, en cherchant un peu, il me semble que l'on retrouve la même histoire, dans un fascicule paru en 1941 dans la collection « Police-Express » des éditions A.B.C., titrée, cette fois-ci « Brelan d'As » où au moins les noms des protagonistes ont été changés.