La capture
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Nicolas Lebel est un auteur que j'ai fortement apprécié pour sa série autour du capitaine Mehrlicht, 5 romans autour d'un policier atypique, à la tête de grenouille, fumeur invétéré, grosse tête et fan d'un jeu télévisé (" Qui veut gagner des millions ", si je me souviens bien.)
Avec cette série, l'auteur m'avait démontré qu'il savait créer des personnages originaux et attachants, qu'il maniait très bien l'humour, que sa plume était plutôt savoureuse et qu'il maîtrisait à la fois le genre policier et sa narration (même si, bien souvent, il usait un peu trop le tic des intrigues entrelacées).
Mais l'auteur eut le défaut d'abandonner Mehrlicht en pleine détresse, ou, du moins, dans une détresse à venir et très prévisible, pour s'intéresser à d'autres personnages.
D'abord dans l'attente de la suite des mésaventures de Mehrlicht, j'ai ensuite compris qu'il ne servait à rien d'attendre et je suis passé à autre chose.
Puis, j'ai fini par revenir vers l'auteur pour découvrir, dubitatif, sa série suivante, celle autour des Furies, un mystérieux groupe qui magouille dans l'ombre pour résoudre des problèmes de leurs clients, n'hésitant pas, pour cela, à tuer...
Le premier épisode, " Le gibier ", m'ayant fortement plu, j'ai enchaîné immédiatement avec le second, " La capture ", sorti en 2023.
La capture :
Morguélen. Un nom funèbre pour une île bretonne giflée par les vents.
Un terrain idéal pour la lieutenante Chen, lancée dans une traque sans merci. Dans son viseur : des tueurs à gages insaisissables, les Furies, déesses du châtiment.
Mais à l’heure de la rencontre, la partie pourrait bien compter plus de joueurs qu’il n’y paraît. Et quand le prêtre de cette île du bout du monde entre à son tour dans la danse, une seule certitude demeure : quelqu’un va mourir.
Jeu de miroirs à huis clos, le nouveau roman de Nicolas Lebel entraîne le lecteur dans une course échevelée où tout n’est qu’ombres et reflets. Porté par l’humour et l’ingéniosité inégalables du lauréat du Prix des lecteurs du Livre de Poche, " La Capture " impose Nicolas Lebel comme l’une des voix les plus brillantes du thriller français.
Yvonne Chen, flic intègre et revancharde, cherche depuis plusieurs mois à retrouver Les Furies, une bande d'assassins à laquelle elle a des comptes à rendre.
Aussi, quand une piste la mène sur l'île de Morguélen, elle n'hésite pas à s'y rendre, bien décider à se faire justice.
Mais, sur place, elle croise deux membres de l'OCLCH, en planque, qui cherchent à prouver que le prêtre de l'église îlienne est un criminel de guerre...
Bon, comme je l'ai déjà dit, j'ai adoré le premier épisode de la série auquel je n'ai quasiment rien trouvé à redire si ce n'est un détail (qui n'en est pas un) de la fin.
Mais là, avant d'aller plus loin, autant préciser que je vais spoiler le premier épisode, donc, si vous ne l'avez pas lu et que vous envisagez de le faire, sauter ce passage.
En effet, ce qui marchait parfaitement dans le premier épisode et faisait tout son charme, c'était le duo de flics que formaient Yvonne Chen et Paul Starski. Les deux étaient à la fois différents et complémentaires et leur relation professionnelle, voire amicale, ajoutait du sel au récit. Malheureusement, Paul Starski étant mort à la fin du premier épisode, j'avais un peu peur pour cette suite...
Et, malheureusement, cette peur fut justifiée, car, il faut bien l'avouer, Paul Starski manque fortement au récit.
Certes, l'auteur tente de compenser en proposant le personnage de Romero, un flic dépressif qui pleure sans raison et sans cesse, mais l'alchimie n'est plus là (revient Starski).
Le deuxième problème réside également dans le fait que, ce qui fonctionnait dans le premier épisode, c'était l'effet de surprise pendant toute une partie du récit.
Les Furies étaient-elles un fantasme d'un flic ayant vrillé et qui mettait sur le compte d'une bande fictive des méfaits qu'il ne pouvait expliquer autrement, ou bien cette organisation secrète existait-elle vraiment ?
De quel côté chercher les coupables des meurtres ? Les gentils de l'histoire étaient-ils vraiment gentils ? Les évènements se déroulant étaient-ils prévus à l'avance par un cerveau supérieur ?
Ici, plus de surprise. On sait que Les Furies existent et on connaît leur fonctionnement et, surtout, leurs " Danses ", ces scénarios qui, par des moyens détournés, leur permettent d'atteindre leur but.
Aussi, très vite, on devine avant les flics qui se cache derrière qui, ce qui est réel et ce qui est joué.
Cela retire forcément de l'intérêt à l'histoire.
Yvonne Chen ne trouvant pas son pendant, son complément, on se retrouve alors face à un simple roman policier. Bon roman policier, certes, mais moins savoureux que le premier épisode, la faute à l'absence de l'effet de surprise, la faute à l'absence de Paul Starski...
Mais peut-on en vouloir à l'auteur ?
Certes non. Effectivement, dans les remerciements, on comprend qu'à la base, " La capture " n'était pas prévu pour amener une suite. En tant que roman, il fonctionnait parfaitement, et la mort de Starski ajoutait un effet dramatique appréciable.
En tant qu'épisode d'une série, par contre, la mort de Starski est préjudiciable.
Mais, puisque Starski était mort, impossible de le faire revivre quand il fut décidé d'écrire une suite.
Du coup, sans Starski, Chen est moins intéressante, car il n'y a plus l'effet de contraste entre elle et son partenaire. Du coup, la policière devient moins originale, moins intéressante.
Bref.
En ce qui concerne l'intrigue, on pourra faire le même reproche que pour le premier épisode, le " tout ça pour ça " du scénario mis en place par les Furies pour arriver à leur but, sachant qu'il y avait sûrement des méthodes plus simples, plus rapides et plus directes.
Mais, là, on comprend que dans l'esprit d'Alecto (le chef des Furies) les " Danses ", les scénarios qu'il met en place, ont autant si ce n'est plus d'importance que le résultat. C'est un jeu, un jeu auquel il aime jouer, et on comprend mieux qu'il mette en place des moyens détournés pour arriver à ses fins.
Là encore, on pourra tiquer au déroulé de la fin du roman (que je spolierais probablement dans ma critique du troisième épisode, " L'Hallali ", que je viens d'entamer).
Au final, un épisode bien moins savoureux que le précédent à cause d'un manque de contraste, d'un manque d'effet de surprise, indus par les événements que l'on a découverts dans le premier épisode, mais un bon roman policier tout de même.