Le signe sanglant
Maurice Boué est un auteur dont je vous ai déjà parlé pour son personnage du Détective Lautrec.
Pourtant, je vais revenir sur le sujet. Pourquoi ? Parce que la littérature populaire est un monde nébuleux dans lequel il est parfois difficile de se retrouver.
Le Détective Lautrec, je l’ai découvert dans la Feuille Populaire de Bruxelles, un journal belge qui diffusait des textes d’auteurs belges.
Parmi ces plumes : René Joison, E. Dumas, Eloi Cleri, C. Duval, Émile Soulié... des noms pas très connus et pour cause.
Dans l’un des titres, de René Joison, un personnage m’avait intrigué : le Détective Lautrec et son « secret du cocu à roulettes ». J’avais très vite relié le Détective Lautrec à l’auteur Maurice Boué en cherchant des livres de cet auteur, j’étais tombé sur des titres qui correspondaient à d’autres, édités dans la Feuille Populaire, mais sous d’autres pseudonymes comme Eloi Cléri. De fil en aiguille, E. Dumas et C. Duval semblaient être également des pseudonymes de Maurice Boué.
Mais pas de Détective Lautrec dans ces autres titres... jusqu’à ce que je tombe sur une édition dans un journal des aventures complètes du Détective Lautrec et que je comprenne le subterfuge.
Dans certains titres diffusés dans la Feuille Populaire, pour ne pas éventer que le même auteur se cachait sous la plupart des pseudonymes, le nom du détective avait été sciemment changé (il est vrai que retrouver le Détective Lautrec dans des histoires écrites par différents auteurs aurait mis la puce à l’oreille).
Du coup, je pensais que le Détective Lautrec n’avait vécu que 3 enquêtes. Eh bien non ! Pour mon plus grand plaisir, le personnage apparaît dans au moins 7 histoires.
« Le signe sanglant » est la troisième enquête du Détective Lautrec.
On retrouve, d’ailleurs, ici, comme dans les titres dont le nom du personnage avait été changé, des évènements qui semblent surnaturels et qui seront expliqués de façons très rationnelles par le détective.
Le signe sanglant : Boulevard Saint-Michel, un matin, le corps d’un homme au visage mutilé est découvert. Le nez et les oreilles ont été coupés et le chiffre 13 est inscrit en rouge sang sur son front. La police se retrouve impuissante, incapable, même, d’identifier la victime. Le détective Lautrec décide de se charger de l’affaire. Son plan : se faire passer pour un tailleur ayant reconnu le défunt et susceptible d’apporter d’autres informations aux forces de l’ordre dans l’espoir que le ou les assassins tenteront de le faire taire. Mais Gaston Lautrec n’a aucune idée de l’adversaire qu’il vient défier et ne se doute pas que son stratagème va fonctionner bien au-delà de ses espérances… pour son plus grand malheur.
Il est curieux de constater que plusieurs auteurs ont été inspirés par la notion de « gang des 13 », à se demander si seul le chiffre suffit à cette coïncidence, si un fait divers aurait pu tous les influencer ou bien si la lecture des uns ou des autres pourrait expliquer ce phénomène. Toujours est-il que les 13 ou Thirteen, des familles ou gangs de bandits, apparaissent dans les aventures de Nick Carter, dans les enquêtes du Commissaire Rosic de Rodolphe Bringer et, maintenant, dans celles du détective Lautrec.
Le détective Lautrec a une sérieuse propension à se retrouver dans des situations qui pourraient effrayer tout un chacun tant elles semblent surnaturelles. Mais le détective Lautrec n’est pas homme à se laisser impressionner et, aussi, est un être très cartésien, très perspicace et particulièrement intelligent.
Pourtant, il lui faudra beaucoup de courage et de sang-froid pour parvenir à déjouer les plans des « 13 », une association de truands de grande envergure dont les membres signent leurs méfaits d’un 13 sanglant.
Et leurs signatures, les méchants, ils vont en laisser à qui mieux mieux. Sur le premier mort, bien évidemment, mais également dans l’officine du petit tailleur joué par Lautrec. Pourtant, le détective est aux aguets. Mais, au petit matin, sans qu’il ne sache comment, un 13 apparaît sur son établi. Le soir suivant, il surveille les lieux en compagnie de son secrétaire particulier. Là encore, une main apparaît et disparaît tout aussi vite, laissant derrière elle un 13 sanglant. Pourtant, les portes et fenêtres sont fermées, les deux hommes étaient à côté de l’établi...
Et les choses ne font que commencer pour Lautrec puisque, quand il commence à comprendre comment agissent les 13, il se retrouve devant de terribles dangers.
Les enquêtes de Lautrec tournent souvent (toujours ?) autour d’évènements qui semblent impossibles à expliquer et que Lautrec parviendra à décortiquer et à, finalement, à expliquer d’une façon très rationnelle.
Le personnage principal est assez succinctement décrit, tant physiquement que mentalement, ce qui a permis à l’auteur de pouvoir changer son nom en fonction des éditions, mais le style et l’histoire font partie intégrante de ces aventures.
L’autre point commun entre toutes les enquêtes de Lautrec est le plaisir du lecteur qui est toujours présent et ce quelque soit l’enquête, le partenaire du détective ou le sujet.
Au final, une enquête de Lautrec dans laquelle, comme toujours, le lecteur se demande comment l’auteur (et le personnage) va parvenir à expliquer tous ces évènements étranges et, surtout, un très bon moment de lecture.