Le fantôme au rire de femme
Marcel Priollet est un auteur phare et culte de la littérature populaire policière. Pour en savoir plus, lire mes précédentes chroniques sur ses deux séries policières : « Monseigneur et son clebs » et « Old Jeep et Marcassin ».
« Old Jeep et Marcassin », justement, est la série qui nous intéresse aujourd’hui puisque « Le fantôme au rire de femme » est le second titre de celle-ci.
LE FANTÔME AU RIRE DE FEMME : La tranquillité de l’Hostellerie du Coin Perdu est troublée par des bruits inhabituels et mystérieux. La nuit, certains clients et même la maîtresse de maison ont croisé un fantôme qui disparaît furtivement en émettant un rire féminin. Le propriétaire, redoutant pour la santé mentale de sa femme et celle, financière, de son entreprise, décide de faire appel au célèbre commissaire MARCASSIN. Mais, par manque de crime, celui-ci refuse de s’occuper de l’affaire. Pour autant, il enjoint au plaignant de contacter son ami le détective américain Gordon PERIWINKLE alias OLD JEEP. Le lendemain, OLD JEEP appelle MARCASSIN pour lui annoncer qu’un homme a été tué au Coin Perdu.
Le détective américain Gordon Periwinkle, alias Old Jeep (à cause de ses initiales), et le commissaire français Marcassin, sont deux personnages que l’on avait découvert dans le premier titre de la série : « Le crime est pour demain ».
Confrontés dans une compétition policière, en Angleterre, les deux amis se retrouvent en France.
Marcassin, refusant de s’occuper de l’affaire de fantôme que vient lui rapporter un aubergiste, confit l’ensemble (l’affaire et l’aubergiste) à son copain Old Jepp.
Ce dernier se rend dans l’hôtel hanté et, le lendemain, appelle Marcassin pour lui signifier qu’un meurtre vient d’être commis. Le commissaire se précipite alors pour rejoindre son ami.
Old Jeep et Marcassin sont les précurseurs des personnages de « Buddy movies », deux hommes que tout oppose. Le premier est jeune, beau, souple, fougueux, sophistiqué, bien élevé, américain. L’autre est plus vieux, plus rustre, plus costaud, plus perspicace, aussi. Et, pourtant, ils sont amis et vont coopérer.
Dans cette histoire de fantôme, Marcel Priollet nous réserve une surprise, qui n’en est pas vraiment une si on a lu le premier opus. Effectivement, étant donné les caractéristiques de chacun et le côté rustre de Marcassin, on s’attend à ce que ce soit Old Jeep qui ait toujours une longueur d’avance et qui soit le plus rusé. Et pourtant, Marcassin en cache sous sa moustache. Le bonhomme, sans en avoir l’air, comprend tout, avant tout le monde et anticipe les évènements au point que cela en est désarmant.
Il faut avouer que dans ce second épisode, Old Jeep tient le rôle du parfait faire valoir. Il est là pour valoriser son partenaire de par son étonnement devant la perspicacité de celui-ci. Peut-être Marcel Priollet voyait-il cela comme une petite vengeance sur les Américains qui se proclamaient les sauveurs de la France à l’époque (bon, ils l’étaient un peu, mais ce n’est pas une raison).
Si l’intrigue n’a rien de particulier et bien que Old Jeep se retrouve en retrait, il est tout de même plaisant de suivre les aventures de Marcassin tant son caractère très français (rustre et râleur) le rend immédiatement sympathique.
Heureusement, d’ailleurs, car l’intrigue elle-même se révèle assez faible ou moins intéressante que celle du premier épisode. L’auteur après avoir confronté ses deux personnages, cherche désormais à les réunir et l’on sent bien que ce n’est pas dans cet épisode qu’il y parvient réellement. Mais, si on a lu « Monseigneur et son clebs » on sait que Marcel Priollet n’est pas toujours tendre avec ses personnages et que, s’il ne les brutalise pas, il ne les met pas toujours en valeur et en avant. C’est aussi ce qui fait l’intérêt de l’auteur et qui peut être un atout.
Cependant, grâce à Marcassin et à une concision qui rend l’ensemble lisible très facilement, le plaisir de lecture est assurément au rendez-vous et, après le point final, il tarde au lecteur de savoir ce que va faire Marcel Priollet de ses deux personnages s’il les mêle à une histoire digne de ce nom. C’est ce qui sera peut-être le cas dans le prochain épisode : « La rose de verre ».
Au final, sans être une déception, ce second épisode n’arrive pas à la hauteur du tout premier, et ce pour une raison évidente : après avoir confronté des personnages aussi différents, il faut désormais réussir à les faire coopérer. La chose n’est pas facile, mais on peut être assuré que Marcel Priollet y est arrivé dans les épisodes suivants.