Une Conjuration de Malfaiteurs
Nat Pinkerton est un personnage littéraire né en 1907 de la plume d’auteur(s) allemand(s) afin de naviguer sur le succès de deux séries provenant des É.-U. : « Nick Carter » et « Buffalo Bill ».
Sachant que les deux séries citées ont été distribuées dans toute l’Europe par les éditions Eichler (puis Sobelli quand celle-ci a racheté tout le catalogue de la précédente), il n’y a rien d’étonnant que « Nat Pinkerton » utilise le même moyen de transport.
Nat Pinkerton est un savant mélange entre les deux séries phares de l’époque. Bien que policier (détective), Nat Pinkerton s’attache moins au milieu urbain que son confrère Nick Carter et se rapproche en cela, parfois, des grands paysages de Buffalo Bill. De même que ce dernier, Nat Pinkerton tente de capitaliser sur une figure emblématique de l’Histoire de l’Ouest, le fameux Allan Pinkerton, créateur de l’Agence de détectives Pinkerton. Ce n’est pas pour rien que l’encart de la 4e de couverture du premier numéro, « Une Conjuration de Malfaiteurs » annonce Nat Pinkerton comme un personnage ayant réellement existé et mort récemment et déclare que les histoires contées sont celles de ses réels exploits. Vous me direz, c’était une coutume à l’époque.
Si la série « Nat Pinkerton » reprend une présentation similaire (même genre de couverture, même genre d’illustrations, titre en cadre rouge, fascicule 32 pages contenant un épisode indépendant...), celle-ci diffère de sa consœur dans le fait qu’au lieu de contenir des pages en doubles colonnes, les 32 pages ne sont couvertes que d’une colonne à la police de caractères nettement plus grosse ce qui, au final, au lieu de produire des textes d’un peu plus de 20 000 mots, en propose un peu moins de 10 000.
Une Conjuration de Malfaiteurs est donc le tout premier épisode édité par Eichler en 1907-1908 (sur 336 titres édités en français parmi les 476 écrits en allemand).
Une Conjuration de Malfaiteurs :
L’illustre détective américain Nat Pinkerton reçoit la visite, chez lui, le soir, d’un homme réclamant son aide pour trouver le meurtrier de sa vieille voisine.
Nat Pinkerton, dont le 6ème sens ne fait jamais défaut, malgré la surprenante insistance du type à vouloir l’amener sur le lieu du crime, préfère d’abord passer prévenir la police.
Mais à quelques pas du bâtiment abritant les forces de l’ordre, l’inconnu se carapate sans demander son reste.
Était-ce un subterfuge dont le but était de jeter le détective dans un piège ? Ou bien le fuyard, malgré ses bonnes intentions, a-t-il eu des démêlés par le passé avec la justice et peut d’être accusé du crime ? C’est ce que Nat Pinkerton est décidé à éclaircir en se rendant à l’adresse indiquée sans s’imaginer des répercussions de sa décision...
Bien que la série « Nat Pinkerton » ne s’attache pas aux villes, comme déjà dis, et qu’elle voyagera parfois dans le monde des cow-boys, des militaires... c’est avant tout une série qui veut profiter du succès des Nick Carter et de l’engouement des lecteurs pour des aventures policières « modernes » où l’apache avec un petit a est remplacé par son confrère urbain avec un grand A.
Il n’y a donc rien d’étonnant que Nat Pinkerton commence dans les rues de la ville même si ce texte liminaire laisse entendre que le détective n’en est pas à son coup d’essai et est déjà célèbre dans son pays. On ne suit donc pas l’ascension d’un détective ni même la naissance de celui-ci (comme dans les séries « Toto Fouinard » de Jules Lermina ou « Le Petit Détective » de Arnould Galopin) mais les péripéties d’un enquêteur déjà averti et reconnu (tout comme dans les Nick Carter).
Nat Pinkerton reçoit la visite tardive d’un bonhomme qui le prit de se rendre immédiatement dans l’appartement de sa vieille voisine qu’il vient de trouver morte égorgée chez elle. La précipitation du type à vouloir l’amener sur place et sa tronche patibulaire font que le détective se méfie et insiste pour aller d’abord à la police. Le gars finit par accepter visiblement à contrecœur et à quelques pas du poste de police, il file sans demander son reste.
Bien décidé à éclaircir le mystère, Nat Pinkerton se rend avec quelques policiers à l’adresse indiquée et y découvre effectivement le cadavre d’une vieille femme. Mais, pourquoi a-t-on tué cette personne alors qu’elle vivait dans le dénuement ? Nat Pinkerton se doute que quelque chose se cache derrière tout ça et va envoyer un de ses adjoints sur la piste du voisin qui s’est carapaté pendant que lui va enquêter auprès des connaissances de la victime.
Moins de 10 000 mots, on se doutera que le principal atout de ce texte ne réside pas dans l’intrigue (ce n’est d’ailleurs pas le but de ce genre de série qui favorise l’action et l’aventure à la réflexion et l’instigation).
Effectivement, l’intrigue ne réserve que peu de suspens et le lecteur suivra le cheminement physique et non de pensée de l’enquêteur pour savoir dans quel piège il va tomber et comment il va s’en sortir.
Sans être d’une qualité littéraire extraordinaire (c’est le lot de toutes ces séries de l’époque qui ont été traduites aussi vite qu’écrites), l’ensemble se lit pourtant plutôt agréablement et offre son bon petit moment de lecture qui ne sera certes pas inoubliable, mais qui en vaut un autre.
Au final, ni mieux ni pire que des Nick Carter, mais avec des aventures et des intrigues plus réduites, les aventures de Nat Pinkerton proposent une petite heure de lecture distrayante à défaut d’être éblouissante. Mais, pour le prix de l’époque, pouvait-on en demander plus ???