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Loto Édition
13 janvier 2019

Coupable(s)

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Ne connaissant pas l’œuvre de l’auteur Samuel Sutra et devant les critiques dithyrambiques sur son roman noir « Coupable(s) », j’ai fini par me laisser tenter alors que, vraisemblablement, de par le goût des personnages récurrents et des polars décalés et drôles, j’aurais plutôt dû être attiré par sa série des « Tontons ».

Mais, qu’à cela ne tienne, revenons-en au roman qui nous occupe aujourd’hui et qui m’a occupé quelques soirées.

Je ferai l’impasse sur la biographie de Samuel Sutra, car, la vie des auteurs m’intéresse autant que l’intégrale de n’importe quelle série AB Prod en langue Pawnee sans sous-titres (mais les Pawnees n’ont pas le mauvais goût de regarder les séries AB Prod contrairement à pas mal de nos concitoyens que l’on pourrait, d’ailleurs, écrire en deux mots).

Bref, je le répète ad nauseam, la seule chose qui m’intéresse, chez un artiste, c’est sa production et donc, chez un auteur, ses textes.

Coupable(s) :

HAÏTI. 12 janvier 2010 – 16 h 50.
Le pays est frappé par le plus meurtrier tremblement de terre de son histoire.
L’aide humanitaire afflue de partout

PARIS. Aujourd’hui.
Une série de meurtres secoue la ville.
Quatre personnes sont retrouvées sauvagement assassinées.
Toutes sont liées à un projet baptisé « Kenscoff ».
Un cinquième individu est recherché.

Pour prêter main-forte à la Brigade criminelle dans cette enquête particulière, un jeune policier rejoint l’équipe.

Haïti, il connaît bien.
Il y est né.

Disons-le tout de suite, comme cela ce sera fait, « Coupable(s) » est ce genre d’œuvre qui souffre d’un rebondissement censé surprendre le lecteur ou le spectateur.

Du coup, vous comprendrez bien que ma volonté d’étayer ma critique pourrait engendrer des révélations qui nuiraient au plaisir futur des lecteurs désireux de se faire une idée par eux-mêmes.

Aussi, je vais prendre un autre exemple : le film d’Alexandre AJA : « Haute Tension ».

Pour ceux qui n’auraient pas vu le film, forcément, l’explication risque de ne pas être claire.

Mais, dans ce film qui suit le parcours d’un tueur en série, le spectateur assiste impuissant à des scènes de poursuites, de tensions, de violences à l’encontre d’une jeune étudiante, et à l’acharnement d’un psychopathe abattant un à un les membres de la famille de la jeune femme avant de tenter de la tuer à son tour.

Au bout d’une heure et demie, on se rend compte que la fille est schizo et que c’est elle la tueuse. Du coup, en repensant à tout le film (enfin, ceux qui l’ont fait, apparemment très peu, puisque le film jouit toujours d’une bonne réputation), on se rend compte que la plupart des scènes, à l’aune de cette révélation ne tiennent plus du tout la route et que le film n’en devient qu’une pénible supercherie.

C’est d’ailleurs tout l’inverse de « 6ème sens » de Night Shyamalan dans lequel tout le film prend un sens à l’issue de la révélation qui, pour le coup, est un choc qui fait de ce film un chef-d’œuvre de construction.

Bin, là, « Coupable(s) » est victime de l’idée de son auteur qui pense surprendre le lecteur et proposer un suspens insoutenable par la même occasion sauf que sa narration ne permet pas la révélation ou bien cette révélation détruit la narration et la rend caduque voire inepte. 

Bon, je ne peux en dire plus sans faire de révélation donc je vous demanderais de me faire confiance sur le sujet d’autant plus que la plupart des faits qui me dérangent fortement, ne semblent déranger que moi, ce qui fait qu’il y a de fortes chances pour que cela ne nuise pas à votre lecture pour peu que vous décidiez de tenter l’expérience.

Le roman suit le parcours de Jean Raph', un jeune policier du Renseignement qui est né à Haïti, mais a été adopté par des parents français dès sa naissance.

Des meurtres sanglants ont été commis sans que la police trouve les meurtriers. Mais, un quatrième crime semble relier les trois précédents et, surtout, démontrer un lien avec des pratiques vaudoues toutes droites issues d’Haïti.

Pour faire avancer l’enquête, le patron de l’unité de la Crim fait donc appel à Jean Raph' qui, en plus d’être né à Haïti, a beaucoup étudié les mœurs et les coutumes de ce pays.

Jean Raph' débarque donc en 36 quai des Orfèvres, la Mecques des policiers avec des yeux qui brillent et dans l’espoir d’y rester.

Sur place, il intègre une équipe qui regroupe les quatre équipes ayant enquêté sur chacun des meurtres plus une psy chargée d’établir le profil du meurtrier.

L’auteur use d’une double narration. Narration à la première personne pour suivre le cheminement de Jean Raph' et narration à la troisième personne pour décrire les actes du criminel. Double narration, alternée, bien évidemment, un procédé plutôt habituel.

Question style, si l’auteur est réputé pour ses romans humoristiques, il est à même de mettre de côté ce penchant quand il lui prend de plonger sa plume dans l’encre noire.

Pour autant, cette plume est suffisamment alerte pour que le roman se lise avec plaisir et les personnages suffisamment intéressant pour ne pas lasser, si ce n’est que la seule femme de l’équipe est forcément jeune, belle et désirable et bien évidemment attirée par le jeune flic.

Mais ce qui pêche le plus dans ce roman, c’est l’intrigue elle-même. Car, à la fin de la lecture, on a le sentiment que l’auteur a tout misé sur son rebondissement, dans une sorte d’autosatisfaction qui le pousse à répéter un peu trop souvent la question à laquelle répond ce rebondissement.

Et c’est là qui réside le nœud du problème puisque, non seulement ce rebondissement détruit l’œuvre, comme je l’ai déjà expliqué, mais, qu’en plus, le lecteur devine ce rebondissement plusieurs chapitres avant que l’auteur ne tente de l’assener en l’espérant comme un uppercut en pleine mâchoire du lecteur alors qu’il n’a guère plus d’impact qu’un soufflet de grand-mère.

C’est d’ailleurs fort dommage, car, sans cela, l’ensemble était plutôt plaisant à lire et avec un peu plus d’idée ou une meilleure structure narrative, le roman aurait même pu s’avérer plutôt bon du fait que l’auteur écrit plutôt bien.

Au final, un roman dans lequel on rentre rapidement et avec plaisir, un plaisir qui ne s’altère pas trop, mais qui s’effrite au fur et à mesure que l’on voit venir la fameuse révélation.

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Commentaires
S
Je n'ai aucun problème avec ton papier, mon ami. Je ne m'irrite pas, ou rarement. Et je rencontre plutôt des problèmes avec les critiques dithyrambiques, car je ne comprends pas ce qu'elles cachent, Tu me fais la gentillesse de ligoter mon bouquin, d'en dire ce que tu en penses, et au vu des auteurs qui habitent tes rayonnages, je n'en tire que de la reconnaissance.<br /> <br /> Mais quand on écrit, on est lu. Et ce qu'on a écrit entraîne parfois des commentaires. Roman, ou blog, avoue que c'est de bonne guerre, et quand on ne te fait pas de retour, c'est qu'on s'en fout. Toi comme moi, c'est ce qu'on souhaite éviter : avoir des lecteurs qui s'en foutent.<br /> <br /> J'ai juste rebondi sur ta phrase, rien de plus. Qu'avec une meilleure structure narrative, le roman aurait pu se révéler bon. On est tous, nous lecteurs, le fruit de biais implicites qui vont nous faire aimer ou pas certains textes. De là à dire que si on ne les a pas aimé, c'est qu'ils n'étaient pas "bons", je dis juste que voilà quoi (je développe pas, tu m'as saisi). Mais je suis pas fâché, je t'ai fait la remarque, voilà tout.<br /> <br /> Après, je te sens plus à même de goûter aux saveurs narratives d'un Tonton que d'un de mes noirs. Question d'affinités, de registre. Si ça te tente, je t'en fais passer un. T'as mon mail, débrouille-toi avec.<br /> <br /> (Comme ça, tu le paieras pas, et tu pourras pas en dire du mal. Tu remarqueras à quel point un auteur heureux peut quand même se révéler tordu )<br /> <br /> Bon, allez, j'arrête de t'écrire, les gens vont encore se faire des idées,ça va jaser et ce sera pas bon pour notre réputation.<br /> <br /> À bientôt.<br /> <br /> Un tien lecteur, pas en colère du tout.
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K
Hello Kamash,<br /> <br /> Sympa d'atterrir sur ce site, et de voir mon book entouré de vieilles couv', de ces bouquins comme je les aime. J'ai l'impression d'être déjà rangé chez les "classiques" alors que j'ai pas encore fini de paumer mes tifs.<br /> <br /> Allez, je me fends d'un petit retour, parce que la plupart des auteurs dont tu causes n'ont plus mal aux dents depuis lure et ne risquent pas de trouver à redire.<br /> <br /> Barthes me dirait que je suis mort aussi et que je n'ai qu'à fermer ma gueule, mais honnêtement, quand tu balances que "le rebondissement détruit l'oeuvre", y'a pas d'oeuvre à détruire. Je dénonce les emmanchés qui se sucrent sur le dos de la misère, si t'as juste retenu ça, le bouquin aura atteint sa cible, qu'il rebondisse ou pas si tu le lâches de haut.<br /> <br /> "Avec une meilleure structure narrative, le roman aurait même pu s’avérer plutôt bon". Je prends bonne note, l'ami ! Trop d'honneur, avec un tel conseil, je devrais peut-être réussir à pas trop merder mon prochain écrit. <br /> <br /> Mais puisque je prends le conseil du critique au petit écrivaillon, prends celui de l'humble écrivaillon. Des fois, ça sert à rien d'en faire des caisses. Dire 'j'ai pas aimé", ça donne le ton, ça pose son bonhomme, et ça évite de tirer à la ligne comme un dingue pour essayer d'élever un "j'aime pas" au rang "c'est raté dans l'absolu, et je vais vous expliquer pourquoi, parce que moi, la structure narrative, c'est mon truc, deux points j'ouvre les guillemets".<br /> <br /> Je vais te faire une confidence, mais tu la gardes pour toi surtout. J'aime pas les paupiettes. Quand je dis que j'aime pas les paupiettes, je peux expliquer en long, en large et surtout en travers pourquoi le cuistot a chié son plat, mon avis ne restera qu'un avis face à un mec qui s'en régale. <br /> <br /> Alors mon prochain book atteindra peut-être (ou pas) le niveau "passable", mais je vais te dire un truc, les yeux dans les yeux : moi, tu me feras jamais bouffer de paupiettes !<br /> <br /> Affectueusement.<br /> <br /> Kamasutra (c'est une contraction aussi, t'as mordu l'astuce ?)
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