Le tueur aux pantoufles
Que voilà un bien étrange roman, surtout si on le sait signé par Frédéric Dard.
Frédéric Dard, je ne dirais pas que je maîtrise sur le bout des doigts (je n’ai dû lire qu’une trentaine de romans de l’auteur dont la plupart tirés de la série San Antonio).
Mais, par rapport aux autres romans que j’ai lus de l’auteur, celui-ci ressemble à un OLNI.
Le roman a été édité en 1951 aux éditions S.E.P.O., sans doute la seule coopération entre l’auteur et l’éditeur.
Le tueur aux pantoufles :
Dans un petit pavillon confortable de la banlieue parisienne, Jango, personnage débonnaire entouré de sa mère et de son fils Zizi, un gamin farceur, mène une vie bien pépère. Il possède un poisson rouge dans un bocal, un lapin apprivoisé. Il jouit de l’estime de son voisinage, la boulangère lui fait les yeux doux. Tout est banal et tranquille.
À un détail près : Jango est tueur à gages...
Il s’est constitué une bonne clientèle ; et avec une seringue, une piqûre, hop ! Il fait ensuite disparaître les cadavres dans une cuve d’acide. Aucune trace, les clients sont contents.
Mais un événement insolite vient bouleverser cette belle organisation : l’utilisation d’une rosette de la Légion d’honneur prélevée sur le veston de la dernière victime, un colonel...
Jango, derrière ses allures de parfait voisin, cache un étonnant tueur en série. Car, Jango tue son prochain pour vivre, pas par passion, ni par vice, mais juste parce que, pour lui, il s’agit d’une occupation comme une autre, au final, il rend service à des gens en les débarrassant d’autres gens...
Seulement, le jour où il débarrasse Maurice de son colonel de tonton afin qu’il puisse hériter, les ennuis vont commencer.
D’abord, parce que le modus operandi de Jango fait qu’il n’y a jamais de corps et sans corps, pas de décès et sans décès, pas d’héritage.
Ensuite parce qu’il a conservé la légion d’honneur du tonton et qu’à chaque fois qu’il la porte, sa morphologie change et personne ne le reconnaît.
Puis, un corps est repêché et reconnu comme le fameux colonel, ce qui ouvre une enquête sur le neveu qui ne sait plus comment réagir : reconnaître le tonton dans le défunt pour toucher l’héritage, mais risquer une enquête pour meurtre, ou bien ne pas le reconnaître...
Mais, comme Maurice a d’abord reconnu le corps et que les autres proches du tonton l’ont reconnu également, Maurice a beau se rétracter, une enquête est ouverte.
Et c’est là que les choses se compliquent puisque le juge chargé de l’enquête est également un client de Jango...
Voici donc un étrange roman, comme je le disais, étrange non seulement dans son intrigue puisqu’elle flirte avec le fantastique, mais également dans le ton qui le rapproche d’une sorte de conte ou de fable un peu onirique.
On oublie ici la noirceur des romans de Frédéric Dard du moment, très inspirés du roman noir à l’américaine ainsi que la plume, l’humour et le travail sur la langue des San Antonio.
Tout est à ce point différent de ce que l’on connaît de l’auteur qu’il aurait probablement été impossible de deviner quel auteur se cachait sous ce roman s’il n’avait été signé.
Le lecteur est alors forcément surpris à la lecture de ce roman, mais peut être également surpris tant le contenu n’a rien à voir avec ce que l’on aurait pu imaginer.
Je dois d’ailleurs avouer que la courte taille de ce roman m’a bien aidé à ne pas me lasser de lui. Non pas qu’il soit mal écrit, mais il ne correspond vraiment pas à ce que je m’attendais en plongeant dans un roman de l’auteur.
Bien difficile d’en dire plus, le mieux est probablement de le lire pour se faire son propre avis.
Au final, pas tant un mauvais roman qu’un roman très (trop ?) surprenant de la part de cet auteur connu principalement pour son travail sur la langue.