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Loto Édition
6 novembre 2022

Trop tard, Mrs Grant !

ML03

Maurice Lambert, de son vrai non Géo Duvic (1900-1968) est un auteur qui est entré dans mon palmarès des maîtres du fascicule policier grâce à son style, ses personnages et, surtout, sa maîtrise du format fasciculaire et du genre policier.

Effectivement, les enquêtes de ses personnages récurrents (le commissaire Mazère, l’inspecteur Machard, l’ancien policier A.B.C. Mine) m’ont enthousiasmé par la qualité littéraire, mais surtout par cette maîtrise rare du format fasciculaire, 32 pages (textes de 8 à 12 000 mots) et du genre policier au sein de ce format contraignant (parvenir à proposer une intrigue, des personnages, des suspects, de fausses pistes, des rebondissements et une fin qui tient la route) que j’ai rarement observé durant mes nombreuses lectures de fascicules…

Mais, après avoir dévoré les « séries » de l’auteur, je plonge maintenant dans ses récits indépendants.

C’est au tour de « Trop tard, Mrs Grant ! » de passer sur le grill.

Ce titre est paru en 1946 sous la forme d’un fascicule de 16 pages, double-colonne (texte de 11 500 mots) dans la collection « ÉNIGMA » des éditions Nicéa.

La collection « ÉNIGMA » est donc une collection d’un peu moins d’une vingtaine de titres qui ont pour particularité (du moins les premiers) de proposer, en fin de lecture, une grille de mots croisés permettant aux lecteurs de trouver l’identité du coupable…

« Trop tard, Mrs Grant ! » est le premier titre de cette collection.

TROP TARD, MRS GRANT !

L’inspecteur O’Mara est appelé dans la propriété de Moor House pour enquêter sur le meurtre de Terry Grant, le fils de la maîtresse de lieux.

La victime a été retrouvée au petit matin, poignardée dans sa chambre. L’arme du crime a disparu ainsi que les bijoux du défunt.

Si la vieille Mrs Grant opte pour l’acte d’un rôdeur, O’Mara est bien convaincu que le coupable est à chercher parmi ceux qui logent à Moor House : Mrs Grant, Norma Grant, sa bru, Sidney et Edna Turner, un couple d’amis de Terry, et M. Graville, un homme qui était en affaires avec Terry Grant… et les divers domestiques…

Une chose est certaine pour le policier, aucun des protagonistes de l’histoire n’a une réaction normale face au décès…

La vieille Mrs Grant, outre le couple formé par son fils Terry et sa bru Norma, abrite dans sa propriété de Moor House, quelques invités (Sidney et Edna Turner, M. Graville) et quelques domestiques.

Quand au petit matin, le valet de chambre découvre Terry mort d’un coup de couteau, l’inspecteur O’Mara, chargé de l’enquête, peut s’étonner de la réaction des divers protagonistes.

Que ce soit la mère ou la femme du défunt, la peine ne semble pas le sentiment premier qui les anime. Quant aux autres… la tristesse n’est pas de mise.

Bien que tout semble indiquer le crime d’un rôdeur (vol des bijoux de la victime, une porte donnant vers l’extérieur demeurée ouverte), la vieille Grant pense que la meurtrière est sa propre bru, une épouse qui n’aimait plus son mari.

D’ailleurs, Norma Grant ne se sent pas à l’aise à Moor House et elle a bien raison…

Si la plupart de mes lectures précédentes des récits de l’auteur proposaient un récit plongeant dans un genre policier classique, ici, on sent que Maurice Lambert s’essaye au roman noir à l’américaine.

C’est probablement la raison qui le pousse à poser son intrigue aux É.-U.

Maurice Lambert cherche donc à offrir aux lecteurs une ambiance noire, pesante, avec un crime commis dans une propriété et la certitude, pour les lecteurs et l’enquêteur que le coupable vient de l’intérieur.

Mais, à l’intérieur, 5 survivants, en plus des domestiques.

Et les interrogatoires des divers protagonistes démontreront à l’inspecteur O’Mara, que chacun a un alibi incontrôlable (ils dormaient tous au moment du crime, mais ils dormaient seuls) et des réactions loin d’être habituelles dans ce genre de circonstance.

Peut-être est-ce contraint par le principe de la collection (la fameuse grille de mots croisés finale révélant l’identité du coupable) qui a imposé à l’auteur le déroulé de son intrigue, le système des interrogatoires, les non-dits et le fait que chaque protagoniste agit bizarrement et pourrait être l’assassin.

Sans doute, même, bien que l’on ai déjà vu ce genre de situation, notamment dans le « Whodunit », sous-genre cher à Agatha Christie dans lequel l’enquêteur regroupe tous les protagonistes d’un crime pour innocenter chacun avant de dénoncer le coupable.

D’ailleurs, la grille a un peu cette fonction, en plus ludique.

Il faut bien avouer que l’aspect ludique et le récit policier ont toujours fait bonne entente.

Que ce soit cette collection, la série des « 13 » de Georges Simenon pour le magazine détective dans laquelle 13 récits contaient chacun un crime avec suffisamment de détails pour que le lecteur devine seul le nom du coupable qui était donné la semaine suivante, « Les 5 dernières minutes » de l’inspecteur Bourrel à la télévision, j’en passe et des meilleurs jusqu’aux nombreux jeux de société s’appuyant sur le genre policier (« Cluedo » en tête).

Bref, c’est donc forcément une bonne idée. D’autant plus que, dans ce récit, on peut facilement se passer de remplir la grille (pour les plus fainéants, les plus impatients, ou les lecteurs de la réédition numérique qui, bien qu’elle comporte la grille, n’est pas un format pratique pour ce genre de sport) pour suivre l’enquête et obtenir la réponse.

Du coup, le passage par la grille n’est pas une obligation et le sauter n’entache en rien le plaisir de lecture.

Pour ce qui est du texte lui-même, je dois avouer que j’ai préféré les enquêtes des récurrents de l’auteur, mais plus parce que le genre abordé n’est pas le même que pour des qualités purement littéraires.

Cependant, l’ensemble est agréable à lire même si on peut tiquer sur la qualité de l’intrigue et surtout de sa conclusion bien que cette faiblesse soit principalement à mettre sur le compte du principe de la collection (la fameuse grille).

On notera, en plus, l’excellence de l’illustration de couverture.

Au final, à partir d’un principe ludique et sympathique (une grille de mots croisés pour découvrir l’identité du coupable), Maurice Lambert propose un récit qui pâtit un peu de ce parti pris, mais qui s’avère tout de même très agréable à lire.

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